Chant VIII
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Déjà l'aurore, au voile de pourpre, brillait sur toute la terre, lorsque Jupiter, qui se plaît à lancer la foudre, convoque l'assemblée des immortels sur l'une des cimes les plus élevées de l'Olympe ; il parle, et tous les dieux prêtent l'oreille a ses discours.

     « Écoutez-moi, dit-il, dieux, et vous, déesses ; je dirai la pen­sée qui agite mon sein : que nulle parmi les déesses, que nul parmi les dieux ne tente de s'opposer à mes ordres ; vous devez tous les approuver, afin que j'accomplisse bientôt mes desseins. Celui que je verrai s'échapper en secret pour secourir soit les Grecs, soit les Troyens, frappé honteusement, reviendra dans l'Olympe ; ou bien je le précipiterai dans le ténébreux Tartare, à l'endroit le plus reculé, où le gouffre souterrain est le plus profond : là sont des portes de fer sur un seuil d'airain. Cet abîme est aussi loin de l'enfer que le cial l'est de la terre ; alors il reconnaîtra combien je suis supérieur à tous les immortels. Voulez-vous l'éprouver et vous en convaincre, ô divinités ? Du haut du ciel suspendez une chaîne d'or, et tous attachez-vous à cette chaîne, dieux, et vous, déesses : vous ne pourrez entraîner sous les régions inférieures Jupiter, maître suprême, quels que soient vos efforts. Mais, à mon tour, lorsque je le voudrai, je vous en­lèverai tous avec la terre, la mer elle-même ; et, si je fixe cette chaîne a l'extrémité de l'Olympe, tout l'univers sera suspendu devant moi : tant je suis au-dessus et des dieux et des hommes. »

     Il dit : tous les immortels restent muets d'étonnement à ce discours, car il venait de parler avec force ; mais enfin la déesse Minerve fait entendre ces mots :

     « Jupiter, père des dieux et souverain des rois, nous le savons, ta force est invincible ; mais nous pleurons sur les Grecs vaillants, qui meurent vaincus par un destin cruel. Oui, nous évite­rons les combats, puisque tu l'ordonnes ; cependant, permets-nous d'inspirer aux Argiens de salutaires conseils, afin qu'ils ne périssent pas tous sous les coups de ta colère. »

     « Rassure-toi, ma fille chérie, lui répond le grand Jupiter en souriant ; sans doute mes paroles partent d'un cœur irrité, mais pour toi je veux être toujours indulgent.»

     A ces mots, il place sous le joug ses chevaux rapides, aux pieds d'airain, a la crinière d'or ; lui-même prend un vêtement où l'or étincelle, saisit le fouet éclatant, et monte sur son char : il hâte ses coursiers, qui, sans effort, volent entre la terre et le ciel étoile ; bientôt il arrive sur l'Ida, source d'abondantes fontaines et retraite des bêtes sauvages, au lieu nommé le Gargare, où ce dieu possède un champ séparé et des autels chargés de parfums. C'est là que le père des dieux et des hommes arrête ses coursiers, les délie du char, et les enveloppe d'un épais nuage. Jupiter alors sur le sommet de la montagne s'assied, éclatant de gloire, en considérant la ville des Troyens et les vaisseaux des Grecs.

     Cependant, après le repas qu'ils ont pris dans leurs tentes, les Grecs se préparaient aux combats. De leur côté, dans Ilion, les Troyens se couvraient aussi de leurs armures ; quoiqu'ils soient moins nombreux, ils s'empressent toutefois de voler au combat, car la nécessité les,contraint de défendre et leurs enfants et leurs épouses. Bientôt les portes sont ouvertes : l'armée en foule, cavaliers et fantassins, se précipite hors de la ville ; un tumulte affreux s'élève de toutes parts.

     Dès que les deux armées se sont rencontrées dans la plaine, aussitôt se confondent les boucliers, les lances, et le courage des guerriers étincelants d'airain ; les boucliers arrondis se heurtent entre eux avec un horrible fracas ; les cris de joie des vainqueurs se mêlent aux cris plaintifs des mourants, et la terre est inondée de sang.

     Tant que dure le matin et que s'élève l'astre sacré du jour, les traits volent des deux armées, et les peuples périssent également. Mais quand le soleil est au milieu des cieux, Jupiter dé­ploie ses balances d'or ; il y place les deux destinées de la mort, sommeil éternel : d'un côté est celle des Troyens, de l'autre celle des Grecs belliqueux. Il saisit en l'élevant le milieu des balances : le jour fatal aux Grecs est arrivé ; leurs destinées penchent vers la terre, et celles des Troyens montent vers les cieux. Alors Ju­piter tonne des hauteurs de l'Ida, et lance sa foudre étincelante au sein de l'armée des Grecs ; a cette vue ils sont saisis d'effroi, et la pâle crainte s'empare de toutes les âmes.

     Idoménée ne résiste plus, ni le grand Agamemnon, ni les deux Ajax, enfants de Mars. Nestor seul s'arrête, Nestor, le protecteur des Grecs ; non qu'il reste volontiers, mais un de ses chevaux est blessé. Le noble Pâris, l'époux de la belle Hélène, a frappé d'un trait ce coursier au sommet du front, à l'endroit où, sur le crâne, naissent les premiers crins : c'est là surtout qu'une blessure est fatale. L'animal se dresse de douleur, car la flèche a pénétré jusque dans la cervelle ; il épouvante les autres coursiers, et se roule près des roues. Nestor s'efforçait, avec son glaive, de couper les traits, lorsqu'un char rapide s'avance dans les rangs des vain­queurs portant un guerrier formidable ; c'était Hector : le vieil­lard allait perdre la vie, si le valeureux Diomède ne l'eût aperçu, Soudain, d'une voix forte, il s'écrie en exhortant Ulysse :

     « Noble fils de Laërte, Ulysse, fertile en ruses, pourquoi fuir ? pourquoi tourner le dos comme un lâche au sein de la foule ? Grains, dans ta fuite, que quelque Troyen ne te frappe par der­rière avec sa lance. Arrête, viens, que nous repoussions loin de ce vieillard un guerrier farouche. »

     Il dit ; mais le sage Ulysse ne l'entend pas, et poursuit sa route vers les vaisseaux des Grecs. Alors Diomède, quoique seul, s'é­lance à la tête des combattants, s'arrête devant les chevaux du fils de Nélée, et lui dit ces mots :

     « 0 Nestor, de jeunes guerriers s'avancent pour te combattre ; cependant la force t'abandonne, et la pesante vieillesse t'accable ; ton écuyer est sans vigueur, et tes chevaux sont tardifs : viens, monte sur ce char, tu verras quels sont les coursiers de Tros, comme ils savent partout, en courant rapidement dans la plaine, éviter ou poursuivre l'ennemi ; ces coursiers, ministres de ter­reur, que j'enlevai naguère au vaillant Énée. Confie les tiens à nos deux écuyers ; nous cependant, marchons contre les guer­riers troyens, et qu'Hector apprenne aujourd'hui combien ma lance est furieuse entre mes mains. »

     Le vieillard ne résiste pas à ce conseil : leurs écuyers, le fort Sthénélus et le généreux Eurymédon, prennent soin des che­vaux de Nestor ; lui monte sur le char auprès de Diomède ; il sai­sit les rênes brillantes, frappe les coursiers, et tous deux en un instant sont près d'Hector. Le fils de Tydée dirige sa lance contre ce guerrier impétueux ; mais le fer se détourne, et frappe à la poitrine, près de la mamelle, le fidèle écuyer d'Hector, le fils de Thébéus, Éniopée, qui tenait les rênes. Il tombe du char, les che­vaux fougueux reculent, et leur guide sent à la fois s'exhaler et son âme et ses forces. Une douleur cruelle déchire le cœur d'Hector à la vue de son compagnon immolé ; mais, malgré la peine qu'il éprouve, il laisse Éniopée étendu sur la terre, et cherche un vaillant écuyer. Ses coursiers ne restent pas longtemps sans guide ; il découvre l'intrépide Archeptolème, fils d'Iphite, le fait monter sur son char, et lui confie les rênes.

     Alors la déroute était entière, et les exploits devenaient inutiles ; sans doute les Troyens se fussent pressés dans Ilion comme de faibles agneaux, si le père des dieux et des hommes n'eût prévu ces malheurs. Son tonnerre gronde avec fracas ; il lance la foudre dévorante, qui devant les chevaux de Diomède sillonne la terre ; une flamme terrible jaillit du soufre embrasé ; les cour­siers , épouvantés, s'abattent sous le char, les rênes brillantes s'échappent des mains de Nestor, et, le cœur plein de troubles, il dit à Diomède :

     « Fils de Tydée, presse la fuite de tes coursiers ; ne vois-tu pas que Jupiter ne veut pas te secourir ? Aujourd'hui le fils de Saturne comble de gloire ce guerrier ; demain il nous l'accordera, si telle est sa volonté. Nul homme, quelle que soit sa vaillance, n'ar­rête la pensée de Jupiter, car il est le plus puissant des dieux. »

    «  Oui sans doute, ô Nestor, répond Diomède, toutes tes pa­roles sont pleines de sagesse ; mais une vive douleur s'empare de ton âme, car un jour Hector s'écriera dans l'assemblée des Troyens : « Le fils de Tydée, reculant devant moi, s'est sauvé dans ses vaisseaux. » C'est ainsi qu'un jour il se vantera ; ah ! puisse alors la terre m'engloutir dans son sein ! »

     « Fils du vaillant Tydée, lui répond le vieillard, pourquoi tenir un tel discours ? Si jamais Hector t'accusait d'être un homme faible ou lâche, il ne persuaderait ni les Troyens, enfants de Dardanus, ni les femmes troyennes dont tu as renversé sur la poussière les vaillants époux. »

     En disant ces mots, il fait retourner les chevaux agiles, et les pousse à travers la foule. Hector et les Troyens, en jetant de grands cris, accablent ces guerriers de traits cruels. Alors le vail­lant Hector s'écrie d'une voix formidable :

     « Fils de Tydée, jadis les valeureux Grecs t'honoraient en t'offrant et la première place, et les meilleures viandes, et les plus larges coupes ; mais à présent ils te mépriseront, car tu n'es qu'une femme. Cours à ta perte, fille timide ; ne crois pas que je te laisse franchir nos tours ni traîner nos épouses dans tes na­vires ; auparavant je te donnerai la mort. »

     A ces paroles , Diomède hésite ; il voudrait retourner son char et combattre Hector : trois fois dans sa pensée et dans son cœur il balance, et trois fois, des montagnes de l'Ida, Jupiter, faisant gronder sa foudre, présage favorable aux Troyens, leur accorde le sort douteux des combats. Cependant Hector anime ses guerriers, et leur crie d'une voix forte :

     « Troyens , Lyciens , et vous, braves enfants de Dardanus, combattez en héros ; amis , rappelez votre mâle valeur. Je le reconnais, bienveillant pour moi, le fils de Saturne me promet la victoire, une gloire immense et la ruine des Grecs. Les insensés ! ils ont élevé des murailles , faibles et méprisables barrières qui n'arrêteront pas ma valeur ; nos coursiers  franchiront aisément ce fossé. Mais lorsque j'arriverai près des vaisseaux, songez à vous armer de feux dévorants. Je veux embraser leur flotte, et près des navires exterminer tous ces Grecs, troublés par les tour billons de la fumée. »

     Ensuite, excitant de la voix ses coursiers, il s'écrie :

     « Xanthe, Podarge, Éton, et toi, généreux Lampus, voici l'instant de me payer les soins que vous prodigue Andromaque, la fille du magnanime Éétion ; elle qui vous présente le pur froment, et prépare le vin pour vous désaltérer, au gré de vos désirs, même avant de songer à moi, qui suis son jeune époux. Poursuivez donc l'ennemi, hâtez-vous; puissions-nous enlever à Nestor ce bouclier dont la gloire s'élève jusqu'aux cieux, ce bouclier d'or dont les poignées mêmes sont d'or massif ! puissions-nous arracher des épaules de Diomède cette riche cuirasse qu'a forgée l'industrieux Vulcain ! Si nous ravissons ces dépouilles, j'espère que cette nuit même les Grecs remonteront sur leurs vaisseaux rapides. »

     Plein d'orgueil, ainsi parlait Hector. Junon, indignée, s'agite sur son trône, et l'Olympien frémit ; puis s'adressant au grand Neptune :

     « Dieu puissant, dit-elle, dont le trident ébranle la terre, ton cœur sera-t-il sans pitié pour ces Grecs expirants ? eux qui, dans Aiguës et dans Hélice, t'apportent sans cesse de nombreuses et magnifiques offrandes. Puisses-tu leur souhaiter la victoire ! Si nous voulions, nous les protecteurs des Grecs, repousser les Troyens et réprimer la puissance de Jupiter, ce dieu, consumé de tristesse, resterait seul sur les montagnes de l'Ida. »

     « Téméraire Junon, répond Neptune irrité, quelle parole oses-tu proférer ? Non, je ne consentirai point à ce que les autres dieux combattent Jupiter, le fils de Saturne, car il est le plus puissant. »

     Tandis que ces divinités discourent ainsi, tout l'espace que renferme le fossé depuis la tour jusqu'aux navires est rempli de chevaux et de guerriers qui se pressent en tumulte. Semblable au dieu Mars, s'élance le fils de Priam, Hector, que Jupiter veut combler de gloire. Sans doute il livrait les vaisseaux à la flamme si l'auguste Junon n'eût placé dans le cœur d'Agamemnon, déjà plein d'ardeur, le désir de ranimer le courage des Grecs. Ce roi parcourt les tentes et les vaisseaux ; il tient en sa main son large manteau de pourpre, et s'arrête vers le navire d'Ulysse, au centre de l'armée, pour être entendu de toutes parts, depuis les tentes d'Ajax, fils de Télamon, jusqu'à celles d'Achille ; car ces guerriers avaient traîné leurs navires aux deux extrémités du camp, se confiant dans leur courage et dans la force de leurs bras. Là, d'une voix formidable, Agamemnon s'écrie :

     « Quelle honte, Argiens , et quel excès d'opprobre, vous qui n'êtes braves qu'en apparence ! Que sont devenus maintenant, nous qui nous disions les plus courageux, que sont devenus les superbes discours que vous profériez avec tant de jactance lorsque dans Lemnos, vous rassasiant de la chair des taureaux, et buvant le vin à pleine coupe, chacun de vous disait qu'il vau­drait à la guerre cent et deux cents Troyens ? Aujourd'hui nous ne valons pas le seul Hector, qui bientôt va livrer notre flotte aux feux dévorants. Grand Jupiter, accablas-tu jamais un roi puissant de tant de maux, le privas-tu jamais de tant de gloire ? Cependant, depuis qu'avec mes navires j'ai touché ce funeste rivage, je n'ai jamais passé devant ton superbe autel sans l'honorer ; sur tous j'ai brûlé les cuisses et la graisse des taureaux, aspirant à détruire la superbe Ilion. Jupiter, du moins, accomplis ce vœu : permets notre retour, favorise notre fuite, et ne souffre pas que sous les coups des Troyens périssent ainsi tous les enfants des Grecs. »

     Ainsi parlait Agamemnon : touché de ses larmes, le maître des dieux consent que l'armée soit sauvée, qu'elle ne succombe pas tout entière. Aussitôt il envoie un aigle, le plus certain des augures, qui, tenant dans ses serres le faon d'une biche rapide, le jette sur l'autel éclatant où les Grecs sacrifiaient à Jupiter, père des oracles. A l'aspect de cet oiseau que leur envoie un dieu puissant, ils fondent avec plus de fureur sur les Troyens, et se rappellent leur courage.

     Alors nul parmi les Grecs, quoique nombreux, nul n'a pu se vanter d'avoir devancé les chevaux agiles du fils de Tydée, en franchissant le fossé pour attaquer l'ennemi. C'est lui qui, le premier, renverse un guerrier illustre parmi les Troyens, Agélaüs, fils de Phradmon : il pressait la fuite de ses coursiers, lors­que Diomède l'atteint par derrière avec sa lance, qui s'enfonce entre les deux épaules et traverse la poitrine. Agélaüs tombe du char, et ses armes retentissent autour de lui.

     Sur les pas de Diomède s'élancent les Atrides, Agamemnon et Ménélas ; à ceux-ci succèdent les deux Ajax, revêtus d'une force impétueuse ; Idoménée et son écuyer Mérion, semblable au dieu  Mars ; Eurypyle, fils d'Évémon ; et Teucer est le neuvième qui s'avance armé de son arc flexible : il s'arrête sous le bouclier d'Ajax, fils de Télamon ; Ajax lui fait un rempart de son bouclier. Le brave Teucer, regardant autour de lui, lançait ses flèches dans la mêlée ; celui qu'elles atteignaient tombait en expirant. Puis Teucer se réfugiait vite auprès d'Ajax, comme un enfant se réfugie près de sa mère, et ce guerrier le couvrait du bouclier étincelant.

     Quel fut le premier des Troyens qu'immola Teucer ? Le pre­mier fut Orsiloque ; ensuite il tue Ormène, Ophéleste, Détor, Chromios, le beau Lycophonte, Amopaon, fils de Polyémon, et Mélanippe : tous, abattus, sont entassés sur la terre féconde. Agamemnon, roi des hommes, plein de joie en voyant ce héros dont l'arc terrible renverse les phalanges troyennes, s'approche de Teucer, et lui dit ces mots :

     « Digne fils de Télamon, ô toi que je chéris, Teucer, prince des peuples, poursuis tes exploits ; tu seras l'honneur des Grecs et celui de ton père Télamon, qui veilla sur ton enfance, et qui t'éleva dans son palais, bien que tu sois né d'un lit étranger ; quoiqu'il soit éloigné, comble-le de gloire. Je le déclare, j'accomplirai ma promesse : si le grand Jupiter, si Minerve, me per­mettent de renverser les hauts remparts d'Ilion, tu recevras, après moi, le plus honorable prix, soit un trépied, soit deux coursiers avec leurs chars, ou bien enfin une jeune captive qui partagera ta couche. »

     « Glorieux fils d'Atrée, répond le généreux Teucer, pourquoi m'exciter encore, lorsque je fais tous mes efforts ? Je combats sans relâche, et de tout mon pouvoir ! Depuis que nous avons repoussé les Troyens vers Ilion, je ne cesse d'abattre ceux qui se présentent à mes flèches. Je viens de lancer huit flèches, à la pointe acérée : toutes ont percé le sein à de jeunes guerriers ; mais je ne puis atteindre ce dogue plein de rage. »

     Il dit, et lance une autre flèche contre Hector : son cœur est impatient de l'atteindre ; mais le trait s'égare, et frappe dans la poitrine le valeureux Gorgythion, un des nobles fils de Priam : la mère qui lui donna le jour, venue de la ville d'Ésyme, était la belle Castianire ; elle avait le port d'une déesse. Comme, dans un jardin, le pavot penche sa tête chargée de fruits et des rosées du printemps ; de même, ce jeune guerrier laisse sous le casque tomber son front appesanti.

     Teucer, toujours brûlant d'exterminer Hector, décoche une autre flèche ; mais elle s'égare encore cette fois : Apollon l'a détournée lui-même ; le dard frappe dans le sein, près de la mamelle, l'intrépide écuyer d'Hector, Archeptolème, plein d'ardeur dans les combats ; il tombe du char, les chevaux fougueux reculent d'effroi, et leur guide sent s'exhaler et son âme et ses forces. Une douleur profonde déchire le cœur d'Hector à la vue de son compagnon immolé ; mais, malgré la peine qu'il éprouve, il le laisse étendu sur la terre, et commande au frère d'Archeptolème, à Cébrion, qui se trouvait à ses côtés, de prendre les rênes des coursiers : le guerrier obéit promptement à cet ordre. Alors Hector s'élance de son char en jetant de grands cris ; il saisit un rocher, et va droit à Teucer ; tout son désir est de l'immoler. Cependant Teucer lui-même avait pris dans le carquois une flèche cruelle qu'il ajustait à la corde; mais au moment où celui-ci, plein d'ardeur, bandait son arc, le terrible Hector lui lance la pierre raboteuse et le frappe près de l'épaule, à l'os qui sépare le cou de la poitrine, endroit mortel ; il brise la corde de son arc, le poignet s'engourdit : Teucer tombe sur ses genoux, et l'arc échappe de ses mains. Ajax n'abandonne point son frère abattu ; soudain il accourt, et le couvre de son bouclier : alors deux amis fidèles se présentent, Mécistée, fils d'Échius, et le divin Alastor ; ces deux guerriers emportent vers les navires Teucer, qui pousse de profonds gémissements.

     Jupiter alors ranime de nouveau la force des Troyens ; ils poussent les Grecs sur le large fossé. Hector marche à leur tête ; ses regards étincellent de fureur. Tel un limier poursuivant de ses pieds légers un lièvre ou un sanglier farouche s'attache à ses cuisses, à ses reins, en observant tous les mouvements de sa proie ; tel Hector poursuit les Grecs, en immolant sans cesse les derniers fuyards. Tous, en sautant, franchissent dans leur course les fossés et les palissades, et plusieurs tombent sous les coups des Troyens. Ils se réfugient enfin près des vaisseaux, s'exhortent mutuellement ; et, les mains élevées vers les deux, ils implorent à grands cris les dieux immortels. Hector excite ses coursiers impétueux, et presse l'ennemi de toutes parts ; il a les yeux de la Gorgone, ou de Mars, fléau des mortels. A cette vue la belle Junon, émue de pitié, adresse à Minerve ces paroles :

     « 0 douleur! fille du grand Jupiter, ne pourrons-nous pas secourir les Grecs expirants, du moins pour la dernière fois ? Vaincus par un destin cruel, ils tombent en foule sous l'effort impétueux d'un seul homme ; il ne met plus de bornes à ses fureurs, cet Hector, auteur de tant de maux. »

     Minerve, aux yeux d'azur, lui répond aussitôt en ces mots :     « Déjà, sous les coups des Grecs, il devrait avoir perdu la vie et les forces aux rivages mêmes de la patrie ; mais mon père, furieux, s'égare en ses funestes desseins ; l'insensé, toujours injuste, est le seul obstacle à mes vengeances. Il ne se rappelle plus combien de fois j'ai sauvé son fils, prêt à succomber sous la puissance d'Eurysthée. Hercule alors implorait le ciel en gémissant, et Jupiter m'envoyait aussitôt pour le secourir. Ah ! si, dans ma prudence, j'eusse prévu ces choses, jamais, lorsque Eurysthée envoya ce héros dans les enfers pour enlever de l'Érèbe le chien du terrible Pluton, jamais Hercule n'eût échappé des eaux profondes du Styx. Jupiter me hait à présent, et veut accomplir les projets de Thétis ; car cette déesse, embrassant ses genoux et le flattant d'une main caressante, l'a supplié d'honorer Achille, fléau destructeur. Un jour cependant il me nommera sa fille chérie ; mais vous, ô Junon, attelez nos agiles coursiers, tandis que, dans le palais du dieu qui porte l'égide, je m'armerai pour la guerre ; nous verrons si le fils de Priam, le vaillant Hector, se réjouira, quand il nous verra paraître au sein des batailles. Ah ! sans doute alors plus d'un Troyen rassasiera de sa chair les chiens et les vautours, en tombant près des navires des Grecs. »

     Elle dit : la déesse aux bras d'albâtre se laisse persuader. L'auguste Junon, la fille du grand Saturne, s'empresse de couvrir les coursiers du harnois éclatant. Minerve, dans le palais de son père, laisse couler à ses pieds le riche voile aux couleurs variées, et qu'elle-même a tissu et brodé de ses mains ; ensuite, revêtant la cuirasse du dieu des tempêtes, elle s'arme pour la guerre, source de tant de larmes. La déesse monte sur le char étincelant, et saisit cette lance forte, énorme, terrible, avec laquelle Minerve renverse les phalanges des guerriers et ceux qui ont excité le courroux de cette fille d'un dieu puissant. Soudain Junon presse du fouet ses coursiers : les portes du ciel s'ouvrent d'elles-mêmes en mugissant ; ces portes gardées par les Heures, à qui fut confié le vaste ciel et l'Olympe, qu'elles ouvrent et ferment par un épais nuage. C'est par là que les déesses dirigent les pas de leurs chevaux dociles.

     Le grand Jupiter les aperçoit des hauteurs de l'Ida ; transporté de colère, il appelle Iris, messagère aux ailes d'or, et lui dit :

     « Va, cours, prompte Iris, ramène-les dans l'Olympe ; ne souffre point qu'elles s'opposent à moi : ce serait nous livrer à de funestes débats. Je le déclare, et j'accomplirai ma promesse : j'abattrai leurs coursiers sous le char, je les précipiterai elles-mêmes de leur siège, et le ferai voler en éclats. Dix années ne pourront guérir les profondes blessures que leur fera ma foudre, afin que Minerve reçoive cette leçon, lorsqu'elle enfreint les ordres de son père. Je conçois moins de ressentiment, moins de colère contre Junon ; car sans cesse elle a coutume de s'op­poser à ce que je désire. »

     Il dit, et, plus vite que la tempête, Iris s'élance des montagnes de l'Ida jusque dans le vaste Olympe. Aux premières portes du ciel elle rencontre les déesses, les arrête, et leur déclare en ces mots les ordres de Jupiter :

     « Où courez-vous ? quelle fureur aveugle vous égare ? Le fils de Saturne ne permet pas qu'on secoure les Grecs ; voici la peine qui vous attend, s'il accomplit sa menace : il abattra vos cour­siers sous le char, vous précipitera vous-mêmes de votre siège, qu'il fera voler en éclats. Dix années ne pourront guérir les profondes blessures que vous fera sa foudre ; ainsi donc, que Minerve apprenne à ne point combattre son père. Il conçoit moins de ressentiment, moins de colère contre Junon ; car sans cesse elle a coutume de s'opposer à ce qu'il désire. Mais vous, terrible Minerve, combien seriez-vous audacieuse si vous osiez diriger contre Jupiter votre énorme lance ! »

     Ayant ainsi parlé, Iris s'éloigne aussitôt : alors Junon, s'adressant à Minerve :

     « Fille du puissant roi qui porte l'égide, dit-elle, pour de faibles mortels ne combattons point Jupiter ; que ces peuples vivent ou périssent au gré du sort, et que ce dieu juste dispense aux Grecs ainsi qu'aux Troyens ce qu'il a résolu dans sa pensée. »

     Elle dit, et retourne son char ; les Heures détellent les superbes coursiers, les attachent à la crèche divine, et inclinent le char contre les murs brillants. Les deux déesses, mêlées à la troupe des immortels, se placent sur des trônes d'or, et leur cœur est rongé de tristesse.

     Cependant Jupiter, des sommets de l'Ida, dirige vers l'Olympe ses coursiers et son char retentissant ; bientôt il atteint la demeure des dieux. Neptune dételle les coursiers, place le char sur l'estrade, et le couvre d'un voile de lin. Alors Jupiter, au vaste regard, se place sur un trône d'or, et sous ses pieds tout l'Olympe s'émeut. Junon et Pallas seules se tiennent à l'écart, résolues à ne point parler ; mais Jupiter, qui connaît leurs se­crètes pensées, fait entendre ces paroles :

     « Pourquoi vous affliger ainsi, Minerve, et vous, Junon ? Cer­tes, vous ne vous êtes pas longtemps fatiguées dans les glorieux combats à immoler les Troyens, contre lesquels vous nourrissez une haine cruelle. Oui sans doute, ma force et mon bras sont in­vincibles; tous les dieux de l'Olympe ne pourraient me vaincre, et vous-mêmes, vos membres ont été glacés de crainte avant d'a­voir vu les combats et les durs travaux de la guerre. Je le dé­clare, j'aurais accompli mes serments ; toutes deux, renversées de votre char, et frappées par ma foudre, vous ne rentriez ja­mais dans l'Olympe, séjour des immortels. »

     A ces mots, Minerve et Junon, par un murmure sourd, témoignent leur dépit : assises l'une près de l'autre, elles méditaient la ruine des Troyens. Minerve garde le silence ; elle n'ose parler, quoique animée d'un violent courroux contre son père ; mais Junon ne contient plus sa fureur dans son sein, et s'écrie :

     « Cruel fils de Saturne, quelles paroles as-tu prononcées ? Nous le savons tous, ta force est invincible ; mais nous pleurons sur les Grecs valeureux qui meurent vaincus par un destin cruel. Oui, nous éviterons les combats, puisque tu le comman­des ; cependant permets que nous inspirions aux Argiens de salutaires conseils, afin que tous ils ne périssent pas sous les coups, de ta colère. »

    Jupiter, dieu des tempêtes, lui répondit aussitôt : « Demain, fière Junon, tu verras, si tel est ton désir, le puissant fils de Saturne accabler de maux plus grands encore l'ar­mée des Grecs belliqueux. Le terrible Hector ne cessera de combattre que lorsque Achille s'élancera de ses navires, au jour où les deux armées, resserrées près de la flotte dans un étroit es­pace, combattront pour le corps de Patrocle : tel est l'arrêt des destins. Je méprise ta colère, quand bien même tu te rendrais aux extrémités de la terre et des mers, où sont Japet et Saturne, privés de la lumière du soleil et de la douce haleine des vents, dont ils sont séparés par le profond Tartare ; oui, lors même que jusque là tu porterais ta course insensée, je me ris de tes mena­ces, quoique rien n'égale ta fureur. »

     Il dit, et la belle Junon ne lui répondit point. Déjà la brillante lumière du soleil s'était précipitée dans l'Océan, en attirant la nuit ténébreuse sur la terre : le jour disparaît, regretté des Troyens ; mais les Grecs voient arriver avec joie cette nuit trois fois désirée.

     Le vaillant Hector rassemble son armée loin des vaisseaux sur les bords du fleuve écumant, en un lieu que n'a point souillé le sang des cadavres ; les guerriers descendent de leurs chars pour écouter les paroles que veut leur adresser Hector, chéri de Jupiter. Ce héros tient en ses mains une lance de onze coudées, dont la pointe d'airain, fixée par un cercle d'or, jette un vif éclat ; appuyé sur cette lance, il adresse ces paroles aux Troyens :

     « Écoutez-moi, Troyens, enfants de Dardanus, et vous, alliés. J'espérais aujourd'hui même, après avoir détruit la flotte et toute l'armée des Grecs, retourner vainqueur dans Ilion ; mais voici la nuit ; elle sauve et les Argiens et leurs vaisseaux, qui bordent le rivage de la mer. Maintenant donc obéissons à la nuit téné­breuse, et préparons le repas du soir. Guerriers, dételez vos che­vaux à la flottante crinière, et donnez-leur la nourriture ; puis hâtez-vous d'amener de la ville les bœufs et les grasses brebis ; apportez aussi de vos demeures le vin délectable, le pur froment, et rassemblez des monceaux de bois, afin que, durant toute la nuit jusqu'au lever de l'aurore matinale, nous allumions des feux dont l'éclat s'élève jusqu'au ciel. Peut-être cette nuit même les Grecs voudront s'enfuir sur le vaste dos des mers : ne souffrez pas que, sans danger, ils montent tranquillement dans leurs vaisseaux ; mais que chacun d'eux, frappé d'une flèche ou d'un javelot, quand il s'élancera sur son navire, ait encore à panser des blessures au sein de ses foyers ; enfin, qu'à l'avenir chacun tremble d'apporter aux rivages troyens le lamentable fléau de la guerre. Vous, hérauts aimés de Jupiter, allez dans Ilion ; ordonnez aux jeunes gens et aux vieillards dont l'âge a blanchi la tête de veiller avec soin par toute la ville, et sur ces tours que les dieux ont bâties ; dites à nos jeunes épouses d'allumer de grands feux dans leurs demeures ; que chacun soit vigilant, de peur qu'une embûche ennemie ne pénètre dans la ville, privée de soldats. Écoutez mes conseils, généreux Troyens : les avis que je propose sont maintenant les plus salutaires ; demain je vous donnerai de nouveaux ordres, et j'espère qu'alors, secondé par Jupiter et par tous les autres dieux, je chasserai ces dogues cruels qu'une fatale destinée conduisit en ces lieux. Pendant toute la nuit soyons attentifs à notre défense. Aux premiers rayons du jour tous, revêtus de nos armes, nous porterons le carnage jusque sur leurs vaisseaux. Je verrai si le fort Diomède me repoussera loin des navires jusque vers nos remparts, ou si, moi-même, le frappant avec l'airain, j'enlèverai ses dépouilles sanglantes. Demain il fera preuve de valeur, s'il résiste aux coups de ma lance ; mais, j'ose le croire, dès l'aurore il tombera le premier couvert de blessures, et ses nombreux compagnons autour de lui. Plût aux dieux que je fusse assuré d'être immortel, de conserver toujours une vive jeunesse, et d'être honoré à l'égal de Minerve ou d'Apollon, comme il est sûr que ce jour sera funeste aux Argiens ! »

     Ainsi parle Hector, et les Troyens applaudissent à grands cris. Aussitôt ils dégagent du joug les chevaux baignés de sueur, et chacun avec des liens les attache à son char ; ensuite ils se hâtent d'amener de la ville les bœufs et les grasses brebis ; ils appor­tent aussi de leurs demeures le vin délectable et le pur froment, rassemblent de grands monceaux de bois, et offrent aux immor­tels de solennelles hécatombes. Les vente, du sein de la plaine, portent jusqu'au ciel le doux parfum des sacrifices ; mais les dieux n'y participent point : ils refusent ces offrandes ; car la ville sacrée d'Ilion leur est odieuse, et Priam, et le peuple de ce roi guerrier. Les Troyens, fiers de leur victoire, durant toute la nuit reposent sur le champ de bataille, à la lueur des feux qu'ils ont allumés. Ainsi, lorsque, dans le ciel, autour de la lune argentée, brillent les étoiles radieuses ; lorsque les vents se taisent dans les airs, qu'on découvre au loin les collines, les sommets des mon­tagnes et les vallées, la vaste étendue des cieux, s'ouvrant de­vant-nous, laisse apercevoir tous les astres, et le cœur du berger est rempli d'allégresse : ainsi brillent de toutes parts les flammes que les Troyens ont allumées devant Ilion, entre la flotte et le Xanthe impétueux. Mille feux étincellent dans la plaine ; le vif éclat de chaque foyer éclaire cinquante guerriers assis alen­tour ; et les chevaux, se repaissant d'orge blanche et d'avoine, attendent près de leurs chars que l'aurore reparaisse sur son trône éclatant.

  ὼς μὲν κροκόπεπλος ἐκίδνατο πᾶσαν ἐπ᾽ αἶαν,
Ζεὺς δὲ θεῶν ἀγορὴν ποιήσατο τερπικέραυνος
ἀκροτάτηι κορυφῆι πολυδειράδος Οὐλύμποιο·
αὐτὸς δέ σφ᾽ ἀγόρευε, θεοὶ δ᾽ ὑπὸ πάντες ἄκουον·
5
κέκλυτέ μευ πάντές τε θεοὶ πᾶσαί τε θέαιναι,
ὄφρ᾽ εἴπω τά με θυμὸς ἐνὶ στήθεσσι κελεύει.
μήτέ τις οὖν θήλεια θεὸς τό γε μήτέ τις ἄρσην
πειράτω διακέρσαι ἐμὸν ἔπος, ἀλλ᾽ ἅμα πάντες
αἰνεῖτ᾽, ὄφρα τάχιστα τελευτήσω τάδε ἔργα.
10
ὃν δ᾽ ἂν ἐγὼν ἀπάνευθε θεῶν ἐθέλοντα νοήσω
ἐλθόντ᾽ ἢ Τρώεσσιν ἀρηγέμεν ἢ Δαναοῖσι
πληγεὶς οὐ κατὰ κόσμον ἐλεύσεται Οὔλυμπον δέ·
ἤ μιν ἑλὼν ῥίψω ἐς Τάρταρον ἠερόεντα
τῆλε μάλ᾽, ἧχι βάθιστον ὑπὸ χθονός ἐστι βέρεθρον,
15
ἔνθα σιδήρειαί τε πύλαι καὶ χάλκεος οὐδός,
τόσσον ἔνερθ᾽ Ἀΐδεω ὅσον οὐρανός ἐστ᾽ ἀπὸ γαίης·
γνώσετ᾽ ἔπειθ᾽ ὅσον εἰμὶ θεῶν κάρτιστος ἁπάντων.
εἰ δ᾽ ἄγε πειρήσασθε θεοὶ ἵνα εἴδετε πάντες·
σειρὴν χρυσείην ἐξ οὐρανόθεν κρεμάσαντες
20
πάντές τ᾽ ἐξάπτεσθε θεοὶ πᾶσαί τε θέαιναι·
ἀλλ᾽ οὐκ ἂν ἐρύσαιτ᾽ ἐξ οὐρανόθεν πεδίον δὲ
Ζῆν᾽ ὕπατον μήστωρ᾽, οὐδ᾽ εἰ μάλα πολλὰ κάμοιτε.
ἀλλ᾽ ὅτε δὴ καὶ ἐγὼ πρόφρων ἐθέλοιμι ἐρύσσαι,
αὐτῆι κεν γαίηι ἐρύσαιμ᾽ αὐτῆι τε θαλάσσηι·
25
σειρὴν μέν κεν ἔπειτα περὶ ῥίον Οὐλύμποιο
δησαίμην, τὰ δέ κ᾽ αὖτε μετήορα πάντα γένοιτο.
τόσσον ἐγὼ περί τ᾽ εἰμὶ θεῶν περί τ᾽ εἴμ᾽ ἀνθρώπων.

ὣς ἔφαθ᾽, οἱ δ᾽ ἄρα πάντες ἀκὴν ἐγένοντο σιωπῆι
μῦθον ἀγασσάμενοι· μάλα γὰρ κρατερῶς ἀγόρευσεν.
30
ὀψὲ δὲ δὴ μετέειπε θεὰ γλαυκῶπις Ἀθήνη·
ὦ πάτερ ἡμέτερε Κρονίδη ὕπατε κρειόντων
εὖ νυ καὶ ἡμεῖς ἴδμεν ὅ τοι σθένος οὐκ ἐπιεικτόν·
ἀλλ᾽ ἔμπης Δαναῶν ὀλοφυρόμεθ᾽ αἰχμητάων,
οἵ κεν δὴ κακὸν οἶτον ἀναπλήσαντες ὄλωνται.
35
ἀλλ᾽ ἤτοι πολέμου μὲν ἀφεξόμεθ᾽ ὡς σὺ κελεύεις·
βουλὴν δ᾽ Ἀργείοις ὑποθησόμεθ᾽ ἥ τις ὀνήσει,
ὡς μὴ πάντες ὄλωνται ὀδυσσαμένοιο τεοῖο.

τὴν δ᾽ ἐπιμειδήσας προσέφη νεφεληγερέτα Ζεύς·
θάρσει Τριτογένεια φίλον τέκος· οὔ νύ τι θυμῶι
40
πρόφρονι μυθέομαι, ἐθέλω δέ τοι ἤπιος εἶναι.

ὣς εἰπὼν ὑπ᾽ ὄχεσφι τιτύσκετο χαλκόποδ᾽ ἵππω
ὠκυπέτα χρυσέηισιν ἐθείρηισιν κομόωντε,
χρυσὸν δ᾽ αὐτὸς ἔδυνε περὶ χροΐ, γέντο δ᾽ ἱμάσθλην
χρυσείην εὔτυκτον, ἑοῦ δ᾽ ἐπεβήσετο δίφρου,
45
μάστιξεν δ᾽ ἐλάαν· τὼ δ᾽ οὐκ ἀέκοντε πετέσθην
μεσσηγὺς γαίης τε καὶ οὐρανοῦ ἀστερόεντος.
Ἴδην δ᾽ ἵκανεν πολυπίδακα μητέρα θηρῶν
Γάργαρον, ἔνθά τέ οἱ τέμενος βωμός τε θυήεις.
ἔνθ᾽ ἵππους ἔστησε πατὴρ ἀνδρῶν τε θεῶν τε
50
λύσας ἐξ ὀχέων, κατὰ δ᾽ ἠέρα πουλὺν ἔχευεν.
αὐτὸς δ᾽ ἐν κορυφῆισι καθέζετο κύδεϊ γαίων
εἰσορόων Τρώων τε πόλιν καὶ νῆας Ἀχαιῶν.

οἳ δ᾽ ἄρα δεῖπνον ἕλοντο κάρη κομόωντες Ἀχαιοὶ
ῥίμφα κατὰ κλισίας, ἀπὸ δ᾽ αὐτοῦ θωρήσσοντο.
55
Τρῶες δ᾽ αὖθ᾽ ἑτέρωθεν ἀνὰ πτόλιν ὁπλίζοντο
παυρότεροι· μέμασαν δὲ καὶ ὧς ὑσμῖνι μάχεσθαι
χρειοῖ ἀναγκαίηι, πρό τε παίδων καὶ πρὸ γυναικῶν.
πᾶσαι δ᾽ ὠΐγνυντο πύλαι, ἐκ δ᾽ ἔσσυτο λαός,
πεζοί θ᾽ ἱππῆές τε· πολὺς δ᾽ ὀρυμαγδὸς ὀρώρει.

 

60
οἳ δ᾽ ὅτε δή ῥ᾽ ἐς χῶρον ἕνα ξυνιόντες ἵκοντο
σύν ῥ᾽ ἔβαλον ῥινούς, σὺν δ᾽ ἔγχεα καὶ μένε᾽ ἀνδρῶν
χαλκεοθωρήκων· ἀτὰρ ἀσπίδες ὀμφαλόεσσαι
ἔπληντ᾽ ἀλλήληισι, πολὺς δ᾽ ὀρυμαγδὸς ὀρώρει.
ἔνθα δ᾽ ἅμ᾽ οἰμωγή τε καὶ εὐχωλὴ πέλεν ἀνδρῶν
65
ὀλλύντων τε καὶ ὀλλυμένων, ῥέε δ᾽ αἵματι γαῖα.

ὄφρα μὲν ἠὼς ἦν καὶ ἀέξετο ἱερὸν ἦμαρ,
τόφρα μάλ᾽ ἀμφοτέρων βέλε᾽ ἥπτετο, πῖπτε δὲ λαός.
ἦμος δ᾽ Ἠέλιος μέσον οὐρανὸν ἀμφιβεβήκει,
καὶ τότε δὴ χρύσεια πατὴρ ἐτίταινε τάλαντα·
70
ἐν δ᾽ ἐτίθει δύο κῆρε τανηλεγέος θανάτοιο
Τρώων θ᾽ ἱπποδάμων καὶ Ἀχαιῶν χαλκοχιτώνων,
ἕλκε δὲ μέσσα λαβών· ῥέπε δ᾽ αἴσιμον ἦμαρ Ἀχαιῶν.
αἳ μὲν Ἀχαιῶν κῆρες ἐπὶ χθονὶ πουλυβοτείρηι
ἑζέσθην, Τρώων δὲ πρὸς οὐρανὸν εὐρὺν ἄερθεν·
75
αὐτὸς δ᾽ ἐξ Ἴδης μεγάλ᾽ ἔκτυπε, δαιόμενον δὲ
ἧκε σέλας μετὰ λαὸν Ἀχαιῶν· οἳ δὲ ἰδόντες
θάμβησαν, καὶ πάντας ὑπὸ χλωρὸν δέος εἷλεν.

ἔνθ᾽ οὔτ᾽ Ἰδομενεὺς τλῆ μίμνειν οὔτ᾽ Ἀγαμέμνων,
οὔτε δύ᾽ Αἴαντες μενέτην θεράποντες Ἄρηος·
80
Νέστωρ οἶος ἔμιμνε Γερήνιος οὖρος Ἀχαιῶν
οὔ τι ἑκών, ἀλλ᾽ ἵππος ἐτείρετο, τὸν βάλεν ἰῶι
δῖος Ἀλέξανδρος Ἑλένης πόσις ἠϋκόμοιο
ἄκρην κὰκ κορυφήν, ὅθι τε πρῶται τρίχες ἵππων
κρανίωι ἐμπεφύασι, μάλιστα δὲ καίριόν ἐστιν.
85
ἀλγήσας δ᾽ ἀνέπαλτο, βέλος δ᾽ εἰς ἐγκέφαλον δῦ,
σὺν δ᾽ ἵππους ἐτάραξε κυλινδόμενος περὶ χαλκῶι.
ὄφρ᾽ ὁ γέρων ἵπποιο παρηορίας ἀπέταμνε
φασγάνωι ἀΐσσων, τόφρ᾽ Ἕκτορος ὠκέες ἵπποι
ἦλθον ἀν᾽ ἰωχμὸν θρασὺν ἡνίοχον φορέοντες
90
Ἕκτορα· καί νύ κεν ἔνθ᾽ ὁ γέρων ἀπὸ θυμὸν ὄλεσσεν
εἰ μὴ ἄρ᾽ ὀξὺ νόησε βοὴν ἀγαθὸς Διομήδης·
σμερδαλέον δ᾽ ἐβόησεν ἐποτρύνων Ὀδυσῆα·
διογενὲς Λαερτιάδη πολυμήχαν᾽ Ὀδυσσεῦ
πῆι φεύγεις μετὰ νῶτα βαλὼν κακὸς ὣς ἐν ὁμίλωι;
95
μή τίς τοι φεύγοντι μεταφρένωι ἐν δόρυ πήξηι·
ἀλλὰ μέν᾽ ὄφρα γέροντος ἀπώσομεν ἄγριον ἄνδρα.

ὣς ἔφατ᾽, οὐδ᾽ ἐσάκουσε πολύτλας δῖος Ὀδυσσεύς,
ἀλλὰ παρήϊξεν κοίλας ἐπὶ νῆας Ἀχαιῶν.
Τυδεΐδης δ᾽ αὐτός περ ἐὼν προμάχοισιν ἐμίχθη,
100
στῆ δὲ πρόσθ᾽ ἵππων Νηληϊάδαο γέροντος,
καί μιν φωνήσας ἔπεα πτερόεντα προσηύδα·
ὦ γέρον ἦ μάλα δή σε νέοι τείρουσι μαχηταί,
σὴ δὲ βίη λέλυται, χαλεπὸν δέ σε γῆρας ὀπάζει,
ἠπεδανὸς δέ νύ τοι θεράπων, βραδέες δέ τοι ἵπποι.
105
ἀλλ᾽ ἄγ᾽ ἐμῶν ὀχέων ἐπιβήσεο, ὄφρα ἴδηαι
οἷοι Τρώϊοι ἵπποι ἐπιστάμενοι πεδίοιο
κραιπνὰ μάλ᾽ ἔνθα καὶ ἔνθα διωκέμεν ἠδὲ φέβεσθαι,
οὕς ποτ᾽ ἀπ᾽ Αἰνείαν ἑλόμην μήστωρε φόβοιο.
τούτω μὲν θεράποντε κομείτων, τώδε δὲ νῶϊ
110
Τρωσὶν ἐφ᾽ ἱπποδάμοις ἰθύνομεν, ὄφρα καὶ Ἕκτωρ
εἴσεται εἰ καὶ ἐμὸν δόρυ μαίνεται ἐν παλάμηισιν.

ὣς ἔφατ᾽, οὐδ᾽ ἀπίθησε Γερήνιος ἱππότα Νέστωρ.
Νεστορέας μὲν ἔπειθ᾽ ἵππους θεράποντε κομείτην
ἴφθιμοι Σθένελός τε καὶ Εὐρυμέδων ἀγαπήνωρ.
115
τὼ δ᾽ εἰς ἀμφοτέρω Διομήδεος ἅρματα βήτην·
Νέστωρ δ᾽ ἐν χείρεσσι λάβ᾽ ἡνία σιγαλόεντα,
μάστιξεν δ᾽ ἵππους· τάχα δ᾽ Ἕκτορος ἄγχι γένοντο.

τοῦ δ᾽ ἰθὺς μεμαῶτος ἀκόντισε Τυδέος υἱός·
καὶ τοῦ μέν ῥ᾽ ἀφάμαρτεν, ὁ δ᾽ ἡνίοχον θεράποντα
120
υἱὸν ὑπερθύμου Θηβαίου Ἠνιοπῆα
ἵππων ἡνί᾽ ἔχοντα βάλε στῆθος παρὰ μαζόν.
ἤριπε δ᾽ ἐξ ὀχέων, ὑπερώησαν δέ οἱ ἵπποι
ὠκύποδες· τοῦ δ᾽ αὖθι λύθη ψυχή τε μένος τε.
Ἕκτορα δ᾽ αἰνὸν ἄχος πύκασε φρένας ἡνιόχοιο·
125
τὸν μὲν ἔπειτ᾽ εἴασε καὶ ἀχνύμενός περ ἑταίρου
κεῖσθαι, ὁ δ᾽ ἡνίοχον μέθεπε θρασύν· οὐδ᾽ ἄρ᾽ ἔτι δὴν
ἵππω δευέσθην σημάντορος· αἶψα γὰρ εὗρεν
Ἰφιτίδην Ἀρχεπτόλεμον θρασύν, ὅν ῥα τόθ᾽ ἵππων
ὠκυπόδων ἐπέβησε, δίδου δέ οἱ ἡνία χερσίν.
130
ἔνθά κε λοιγὸς ἔην καὶ ἀμήχανα ἔργα γένοντο,
καί νύ κε σήκασθεν κατὰ Ἴλιον ἠΰτε ἄρνες,
εἰ μὴ ἄρ᾽ ὀξὺ νόησε πατὴρ ἀνδρῶν τε θεῶν τε·
βροντήσας δ᾽ ἄρα δεινὸν ἀφῆκ᾽ ἀργῆτα κεραυνόν,
κὰδ δὲ πρόσθ᾽ ἵππων Διομήδεος ἧκε χαμᾶζε·
135
δεινὴ δὲ φλὸξ ὦρτο θεείου καιομένοιο,
τὼ δ᾽ ἵππω δείσαντε καταπτήτην ὑπ᾽ ὄχεσφι·
Νέστορα δ᾽ ἐκ χειρῶν φύγον ἡνία σιγαλόεντα,
δεῖσε δ᾽ ὅ γ᾽ ἐν θυμῶι, Διομήδεα δὲ προσέειπε·
Τυδεΐδη ἄγε δ᾽ αὖτε φόβον δ᾽ ἔχε μώνυχας ἵππους.
140
ἦ οὐ γιγνώσκεις ὅ τοι ἐκ Διὸς οὐχ ἕπετ᾽ ἀλκή;
νῦν μὲν γὰρ τούτωι Κρονίδης Ζεὺς κῦδος ὀπάζει
σήμερον· ὕστερον αὖτε καὶ ἡμῖν, αἴ κ᾽ ἐθέληισι,
δώσει· ἀνὴρ δέ κεν οὔ τι Διὸς νόον εἰρύσσαιτο
οὐδὲ μάλ᾽ ἴφθιμος, ἐπεὶ ἦ πολὺ φέρτερός ἐστι.

 

145
τὸν δ᾽ ἠμείβετ᾽ ἔπειτα βοὴν ἀγαθὸς Διομήδης·
ναὶ δὴ ταῦτά γε πάντα γέρον κατὰ μοῖραν ἔειπες·
ἀλλὰ τόδ᾽ αἰνὸν ἄχος κραδίην καὶ θυμὸν ἱκάνει·
Ἕκτωρ γάρ ποτε φήσει ἐνὶ Τρώεσσ᾽ ἀγορεύων·
Τυδεΐδης ὑπ᾽ ἐμεῖο φοβεύμενος ἵκετο νῆας.
150
ὥς ποτ᾽ ἀπειλήσει· τότε μοι χάνοι εὐρεῖα χθών.

τὸν δ᾽ ἠμείβετ᾽ ἔπειτα Γερήνιος ἱππότα Νέστωρ·
ὤ μοι Τυδέος υἱὲ δαΐφρονος, οἷον ἔειπες.
εἴ περ γάρ σ᾽ Ἕκτωρ γε κακὸν καὶ ἀνάλκιδα φήσει,
ἀλλ᾽ οὐ πείσονται Τρῶες καὶ Δαρδανίωνες
155
καὶ Τρώων ἄλοχοι μεγαθύμων ἀσπιστάων,
τάων ἐν κονίηισι βάλες θαλεροὺς παρακοίτας.

ὣς ἄρα φωνήσας φύγαδε τράπε μώνυχας ἵππους
αὖτις ἀν᾽ ἰωχμόν· ἐπὶ δὲ Τρῶές τε καὶ Ἕκτωρ
ἠχῆι θεσπεσίηι βέλεα στονόεντα χέοντο.
160
τῶι δ᾽ ἐπὶ μακρὸν ἄϋσε μέγας κορυθαίολος Ἕκτωρ·
Τυδεΐδη περὶ μέν σε τίον Δαναοὶ ταχύπωλοι
ἕδρηι τε κρέασίν τε ἰδὲ πλείοις δεπάεσσι·
νῦν δέ σ᾽ ἀτιμήσουσι· γυναικὸς ἄρ᾽ ἀντὶ τέτυξο.
ἔρρε κακὴ γλήνη, ἐπεὶ οὐκ εἴξαντος ἐμεῖο
165
πύργων ἡμετέρων ἐπιβήσεαι, οὐδὲ γυναῖκας
ἄξεις ἐν νήεσσι· πάρος τοι δαίμονα δώσω.

ὣς φάτο, Τυδεΐδης δὲ διάνδιχα μερμήριξεν
ἵππους τε στρέψαι καὶ ἐναντίβιον μαχέσασθαι.
τρὶς μὲν μερμήριξε κατὰ φρένα καὶ κατὰ θυμόν,
170
τρὶς δ᾽ ἄρ᾽ ἀπ᾽ Ἰδαίων ὀρέων κτύπε μητίετα Ζεὺς
σῆμα τιθεὶς Τρώεσσι μάχης ἑτεραλκέα νίκην.
Ἕκτωρ δὲ Τρώεσσιν ἐκέκλετο μακρὸν ἀΰσας·
Τρῶες καὶ Λύκιοι καὶ Δάρδανοι ἀγχιμαχηταὶ
ἀνέρες ἔστε φίλοι, μνήσασθε δὲ θούριδος ἀλκῆς.
175
γιγνώσκω δ᾽ ὅτι μοι πρόφρων κατένευσε Κρονίων
νίκην καὶ μέγα κῦδος, ἀτὰρ Δαναοῖσί γε πῆμα·
νήπιοι οἳ ἄρα δὴ τάδε τείχεα μηχανόωντο
ἀβλήχρ᾽ οὐδενόσωρα· τὰ δ᾽ οὐ μένος ἁμὸν ἐρύξει·
ἵπποι δὲ ῥέα τάφρον ὑπερθορέονται ὀρυκτήν.
180
ἀλλ᾽ ὅτε κεν δὴ νηυσὶν ἔπι γλαφυρῆισι γένωμαι,
μνημοσύνη τις ἔπειτα πυρὸς δηΐοιο γενέσθω,
ὡς πυρὶ νῆας ἐνιπρήσω, κτείνω δὲ καὶ αὐτοὺς
Ἀργείους παρὰ νηυσὶν ἀτυζομένους ὑπὸ καπνοῦ.

ὣς εἰπὼν ἵπποισιν ἐκέκλετο φώνησέν τε·
185
Ξάνθέ τε καὶ σὺ Πόδαργε καὶ Αἴθων Λάμπέ τε δῖε
νῦν μοι τὴν κομιδὴν ἀποτίνετον, ἣν μάλα πολλὴν
Ἀνδρομάχη θυγάτηρ μεγαλήτορος Ἠετίωνος
ὑμῖν πὰρ προτέροισι μελίφρονα πυρὸν ἔθηκεν
οἶνόν τ᾽ ἐγκεράσασα πιεῖν, ὅτε θυμὸς ἀνώγοι,
190
ἢ ἐμοί, ὅς πέρ οἱ θαλερὸς πόσις εὔχομαι εἶναι.

ἀλλ᾽ ἐφομαρτεῖτον καὶ σπεύδετον ὄφρα λάβωμεν
ἀσπίδα Νεστορέην, τῆς νῦν κλέος οὐρανὸν ἵκει
πᾶσαν χρυσείην ἔμεναι, κανόνας τε καὶ αὐτήν,
αὐτὰρ ἀπ᾽ ὤμοιιν Διομήδεος ἱπποδάμοιο
195
δαιδάλεον θώρηκα, τὸν Ἥφαιστος κάμε τεύχων.
εἰ τούτω κε λάβοιμεν, ἐελποίμην κεν Ἀχαιοὺς
αὐτονυχὶ νηῶν ἐπιβησέμεν ὠκειάων.

ὣς ἔφατ᾽ εὐχόμενος, νεμέσησε δὲ πότνια Ἥρη,
σείσατο δ᾽ εἰνὶ θρόνωι, ἐλέλιξε δὲ μακρὸν Ὄλυμπον,
200
καί ῥα Ποσειδάωνα μέγαν θεὸν ἀντίον ηὔδα·
ὢ πόποι ἐννοσίγαι᾽ εὐρυσθενές, οὐδέ νυ σοί περ
ὀλλυμένων Δαναῶν ὀλοφύρεται ἐν φρεσὶ θυμός.
οἳ δέ τοι εἰς Ἑλίκην τε καὶ Αἰγὰς δῶρ᾽ ἀνάγουσι
πολλά τε καὶ χαρίεντα· σὺ δέ σφισι βούλεο νίκην.
205
εἴ περ γάρ κ᾽ ἐθέλοιμεν, ὅσοι Δαναοῖσιν ἀρωγοί,
Τρῶας ἀπώσασθαι καὶ ἐρυκέμεν εὐρύοπα Ζῆν,
αὐτοῦ κ᾽ ἔνθ᾽ ἀκάχοιτο καθήμενος οἶος ἐν Ἴδηι.

τὴν δὲ μέγ᾽ ὀχθήσας προσέφη κρείων ἐνοσίχθων·
Ἥρη ἀπτοεπὲς ποῖον τὸν μῦθον ἔειπες.
210
οὐκ ἂν ἔγωγ᾽ ἐθέλοιμι Διὶ Κρονίωνι μάχεσθαι
ἡμέας τοὺς ἄλλους, ἐπεὶ ἦ πολὺ φέρτερός ἐστιν.

ὣς οἳ μὲν τοιαῦτα πρὸς ἀλλήλους ἀγόρευον·
τῶν δ᾽ ὅσον ἐκ νηῶν ἀπὸ πύργου τάφρος ἔεργε
πλῆθεν ὁμῶς ἵππων τε καὶ ἀνδρῶν ἀσπιστάων
215
εἰλομένων· εἴλει δὲ θοῶι ἀτάλαντος Ἄρηϊ
Ἕκτωρ Πριαμίδης, ὅτε οἱ Ζεὺς κῦδος ἔδωκε.
καί νύ κ᾽ ἐνέπρησεν πυρὶ κηλέωι νῆας ἐΐσας,
εἰ μὴ ἐπὶ φρεσὶ θῆκ᾽ Ἀγαμέμνονι πότνια Ἥρη
αὐτῶι ποιπνύσαντι θοῶς ὀτρῦναι Ἀχαιούς.
220
βῆ δ᾽ ἰέναι παρά τε κλισίας καὶ νῆας Ἀχαιῶν
πορφύρεον μέγα φᾶρος ἔχων ἐν χειρὶ παχείηι,
στῆ δ᾽ ἐπ᾽ Ὀδυσσῆος μεγακήτεϊ νηῒ μελαίνηι,
ἥ ῥ᾽ ἐν μεσσάτωι ἔσκε γεγωνέμεν ἀμφοτέρωσε,
ἠμὲν ἐπ᾽ Αἴαντος κλισίας Τελαμωνιάδαο
225
ἠδ᾽ ἐπ᾽ Ἀχιλλῆος, τοί ῥ᾽ ἔσχατα νῆας ἐΐσας
εἴρυσαν, ἠνορέηι πίσυνοι καὶ κάρτεϊ χειρῶν·
ἤϋσεν δὲ διαπρύσιον Δαναοῖσι γεγωνώς·
αἰδὼς Ἀργεῖοι, κάκ᾽ ἐλέγχεα, εἶδος ἀγητοί·
πῆι ἔβαν εὐχωλαί, ὅτε δὴ φάμεν εἶναι ἄριστοι,
230
ἃς ὁπότ᾽ ἐν Λήμνωι κενεαυχέες ἠγοράασθε,
ἔσθοντες κρέα πολλὰ βοῶν ὀρθοκραιράων
πίνοντες κρητῆρας ἐπιστεφέας οἴνοιο,
Τρώων ἄνθ᾽ ἑκατόν τε διηκοσίων τε ἕκαστος
στήσεσθ᾽ ἐν πολέμωι· νῦν δ᾽ οὐδ᾽ ἑνὸς ἄξιοί εἰμεν
235
Ἕκτορος, ὃς τάχα νῆας ἐνιπρήσει πυρὶ κηλέωι.
Ζεῦ πάτερ, ἦ ῥά τιν᾽ ἤδη ὑπερμενέων βασιλήων
τῆιδ᾽ ἄτηι ἄασας καί μιν μέγα κῦδος ἀπηύρας;
οὐ μὲν δή ποτέ φημι τεὸν περικαλλέα βωμὸν
νηῒ πολυκλήϊδι παρελθέμεν ἐνθάδε ἔρρων,
240
ἀλλ᾽ ἐπὶ πᾶσι βοῶν δημὸν καὶ μηρί᾽ ἔκηα
ἱέμενος Τροίην εὐτείχεον ἐξαλαπάξαι.
ἀλλὰ Ζεῦ τόδε πέρ μοι ἐπικρήηνον ἐέλδωρ·
αὐτοὺς δή περ ἔασον ὑπεκφυγέειν καὶ ἀλύξαι,
μηδ᾽ οὕτω Τρώεσσιν ἔα δάμνασθαι Ἀχαιούς.

 

245
ὣς φάτο, τὸν δὲ πατὴρ ὀλοφύρατο δάκρυ χέοντα,
νεῦσε δέ οἱ λαὸν σόον ἔμμεναι οὐδ᾽ ἀπολέσθαι.
αὐτίκα δ᾽ αἰετὸν ἧκε τελειότατον πετεηνῶν,
νεβρὸν ἔχοντ᾽ ὀνύχεσσι τέκος ἐλάφοιο ταχείης·
πὰρ δὲ Διὸς βωμῶι περικαλλέϊ κάββαλε νεβρόν,
250
ἔνθα πανομφαίωι Ζηνὶ ῥέζεσκον Ἀχαιοί.
οἳ δ᾽ ὡς οὖν εἴδονθ᾽ ὅ τ᾽ ἄρ᾽ ἐκ Διὸς ἤλυθεν ὄρνις,
μᾶλλον ἐπὶ Τρώεσσι θόρον, μνήσαντο δὲ χάρμης.

ἔνθ᾽ οὔ τις πρότερος Δαναῶν πολλῶν περ ἐόντων
εὔξατο Τυδεΐδαο πάρος σχέμεν ὠκέας ἵππους
255
τάφρου τ᾽ ἐξελάσαι καὶ ἐναντίβιον μαχέσασθαι,
ἀλλὰ πολὺ πρῶτος Τρώων ἕλεν ἄνδρα κορυστὴν
Φραδμονίδην Ἀγέλαον· ὁ μὲν φύγαδ᾽ ἔτραπεν ἵππους·
τῶι δὲ μεταστρεφθέντι μεταφρένωι ἐν δόρυ πῆξεν
ὤμων μεσσηγύς, διὰ δὲ στήθεσφιν ἔλασσεν·
260
ἤριπε δ᾽ ἐξ ὀχέων, ἀράβησε δὲ τεύχε᾽ ἐπ᾽ αὐτῶι.

τὸν δὲ μετ᾽ Ἀτρεΐδαι Ἀγαμέμνων καὶ Μενέλαος,
τοῖσι δ᾽ ἐπ᾽ Αἴαντες θοῦριν ἐπιειμένοι ἀλκήν,
τοῖσι δ᾽ ἐπ᾽ Ἰδομενεὺς καὶ ὀπάων Ἰδομενῆος
Μηριόνης ἀτάλαντος Ἐνυαλίωι ἀνδρειφόντηι,
265
τοῖσι δ᾽ ἐπ᾽ Εὐρύπυλος Εὐαίμονος ἀγλαὸς υἱός·
Τεῦκρος δ᾽ εἴνατος ἦλθε παλίντονα τόξα τιταίνων,
στῆ δ᾽ ἄρ᾽ ὑπ᾽ Αἴαντος σάκεϊ Τελαμωνιάδαο.
ἔνθ᾽ Αἴας μὲν ὑπεξέφερεν σάκος· αὐτὰρ ὅ γ᾽ ἥρως
παπτήνας, ἐπεὶ ἄρ τιν᾽ ὀϊστεύσας ἐν ὁμίλωι
270
βεβλήκοι, ὁ μὲν αὖθι πεσὼν ἀπὸ θυμὸν ὄλεσσεν,
αὐτὰρ ὁ αὖτις ἰὼν πάϊς ὣς ὑπὸ μητέρα δύσκεν
εἰς Αἴανθ᾽· ὁ δέ μιν σάκεϊ κρύπτασκε φαεινῶι.

ἔνθα τίνα πρῶτον Τρώων ἕλε Τεῦκρος ἀμύμων;
Ὀρσίλοχον μὲν πρῶτα καὶ Ὄρμενον ἠδ᾽ Ὀφελέστην
275
Δαίτορά τε Χρομίον τε καὶ ἀντίθεον Λυκοφόντην
καὶ Πολυαιμονίδην Ἀμοπάονα καὶ Μελάνιππον,
πάντας ἐπασσυτέρους πέλασε χθονὶ πουλυβοτείρηι.
τὸν δὲ ἰδὼν γήθησεν ἄναξ ἀνδρῶν Ἀγαμέμνων
τόξου ἄπο κρατεροῦ Τρώων ὀλέκοντα φάλαγγας·
280
στῆ δὲ παρ᾽ αὐτὸν ἰὼν καί μιν πρὸς μῦθον ἔειπε·
Τεῦκρε φίλη κεφαλή, Τελαμώνιε κοίρανε λαῶν
βάλλ᾽ οὕτως, αἴ κέν τι φόως Δαναοῖσι γένηαι
πατρί τε σῶι Τελαμῶνι, ὅ σ᾽ ἔτρεφε τυτθὸν ἐόντα,
καί σε νόθον περ ἐόντα κομίσσατο ὧι ἐνὶ οἴκωι·
285
τὸν καὶ τηλόθ᾽ ἐόντα ἐϋκλείης ἐπίβησον.
σοὶ δ᾽ ἐγὼ ἐξερέω ὡς καὶ τετελεσμένον ἔσται·
αἴ κέν μοι δώηι Ζεύς τ᾽ αἰγίοχος καὶ Ἀθήνη
Ἰλίου ἐξαλαπάξαι ἐϋκτίμενον πτολίεθρον,
πρώτωι τοι μετ᾽ ἐμὲ πρεσβήϊον ἐν χερὶ θήσω,
290
ἢ τρίποδ᾽ ἠὲ δύω ἵππους αὐτοῖσιν ὄχεσφιν
ἠὲ γυναῖχ᾽, ἥ κέν τοι ὁμὸν λέχος εἰσαναβαίνοι.

τὸν δ᾽ ἀπαμειβόμενος προσεφώνεε Τεῦκρος ἀμύμων·
Ἀτρεΐδη κύδιστε τί με σπεύδοντα καὶ αὐτὸν
ὀτρύνεις; οὐ μέν τοι ὅση δύναμίς γε πάρεστι
295
παύομαι, ἀλλ᾽ ἐξ οὗ προτὶ Ἴλιον ὠσάμεθ᾽ αὐτοὺς
ἐκ τοῦ δὴ τόξοισι δεδεγμένος ἄνδρας ἐναίρω.
ὀκτὼ δὴ προέηκα τανυγλώχινας ὀϊστούς,
πάντες δ᾽ ἐν χροῒ πῆχθεν ἀρηϊθόων αἰζηῶν·
τοῦτον δ᾽ οὐ δύναμαι βαλέειν κύνα λυσσητῆρα.

 

300
ἦ ῥα καὶ ἄλλον ὀϊστὸν ἀπὸ νευρῆφιν ἴαλλεν
Ἕκτορος ἀντικρύ, βαλέειν δέ ἑ ἵετο θυμός·
καὶ τοῦ μέν ῥ᾽ ἀφάμαρθ᾽, ὁ δ᾽ ἀμύμονα Γοργυθίωνα
υἱὸν ἐῢν Πριάμοιο κατὰ στῆθος βάλεν ἰῶι,
τόν ῥ᾽ ἐξ Αἰσύμηθεν ὀπυιομένη τέκε μήτηρ
305
καλὴ Καστιάνειρα δέμας ἐϊκυῖα θεῆισι.
μήκων δ᾽ ὡς ἑτέρωσε κάρη βάλεν, ἥ τ᾽ ἐνὶ κήπωι
καρπῶι βριθομένη νοτίηισί τε εἰαρινῆισιν,
ὣς ἑτέρωσ᾽ ἤμυσε κάρη πήληκι βαρυνθέν.

Τεῦκρος δ᾽ ἄλλον ὀϊστὸν ἀπὸ νευρῆφιν ἴαλλεν
310
Ἕκτορος ἀντικρύ, βαλέειν δέ ἑ ἵετο θυμός.
ἀλλ᾽ ὅ γε καὶ τόθ᾽ ἅμαρτε· παρέσφηλεν γὰρ Ἀπόλλων·
ἀλλ᾽ Ἀρχεπτόλεμον θρασὺν Ἕκτορος ἡνιοχῆα
ἱέμενον πόλεμον δὲ βάλε στῆθος παρὰ μαζόν·
ἤριπε δ᾽ ἐξ ὀχέων, ὑπερώησαν δέ οἱ ἵπποι
315
ὠκύποδες· τοῦ δ᾽ αὖθι λύθη ψυχή τε μένος τε.
Ἕκτορα δ᾽ αἰνὸν ἄχος πύκασε φρένας ἡνιόχοιο·
τὸν μὲν ἔπειτ᾽ εἴασε καὶ ἀχνύμενός περ ἑταίρου,
Κεβριόνην δ᾽ ἐκέλευσεν ἀδελφεὸν ἐγγὺς ἐόντα
ἵππων ἡνί᾽ ἑλεῖν· ὁ δ᾽ ἄρ᾽ οὐκ ἀπίθησεν ἀκούσας.
320
αὐτὸς δ᾽ ἐκ δίφροιο χαμαὶ θόρε παμφανόωντος
σμερδαλέα ἰάχων· ὁ δὲ χερμάδιον λάβε χειρί,
βῆ δ᾽ ἰθὺς Τεύκρου, βαλέειν δέ ἑ θυμὸς ἀνώγει.
ἤτοι ὁ μὲν φαρέτρης ἐξείλετο πικρὸν ὀϊστόν,
θῆκε δ᾽ ἐπὶ νευρῆι· τὸν δ᾽ αὖ κορυθαίολος Ἕκτωρ
325
αὐερύοντα παρ᾽ ὦμον, ὅθι κληῒς ἀποέργει
αὐχένα τε στῆθός τε, μάλιστα δὲ καίριόν ἐστι,
τῆι ῥ᾽ ἐπὶ οἷ μεμαῶτα βάλεν λίθωι ὀκριόεντι,
ῥῆξε δέ οἱ νευρήν· νάρκησε δὲ χεὶρ ἐπὶ καρπῶι,
στῆ δὲ γνὺξ ἐριπών, τόξον δέ οἱ ἔκπεσε χειρός.
330
Αἴας δ᾽ οὐκ ἀμέλησε κασιγνήτοιο πεσόντος,
ἀλλὰ θέων περίβη καί οἱ σάκος ἀμφεκάλυψε.
τὸν μὲν ἔπειθ᾽ ὑποδύντε δύω ἐρίηρες ἑταῖροι
Μηκιστεὺς Ἐχίοιο πάϊς καὶ δῖος Ἀλάστωρ
νῆας ἔπι γλαφυρὰς φερέτην βαρέα στενάχοντα.

 

335
ἂψ δ᾽ αὖτις Τρώεσσιν Ὀλύμπιος ἐν μένος ὦρσεν·
οἳ δ᾽ ἰθὺς τάφροιο βαθείης ὦσαν Ἀχαιούς·
Ἕκτωρ δ᾽ ἐν πρώτοισι κίε σθένεϊ βλεμεαίνων.
ὡς δ᾽ ὅτε τίς τε κύων συὸς ἀγρίου ἠὲ λέοντος
ἅπτηται κατόπισθε ποσὶν ταχέεσσι διώκων
340
ἰσχία τε γλουτούς τε, ἑλισσόμενόν τε δοκεύει,
ὣς Ἕκτωρ ὤπαζε κάρη κομόωντας Ἀχαιούς,
αἰὲν ἀποκτείνων τὸν ὀπίστατον· οἳ δὲ φέβοντο.
αὐτὰρ ἐπεὶ διά τε σκόλοπας καὶ τάφρον ἔβησαν
φεύγοντες, πολλοὶ δὲ δάμεν Τρώων ὑπὸ χερσίν,
345
οἳ μὲν δὴ παρὰ νηυσὶν ἐρητύοντο μένοντες,
ἀλλήλοισί τε κεκλόμενοι καὶ πᾶσι θεοῖσι
χεῖρας ἀνίσχοντες μεγάλ᾽ εὐχετόωντο ἕκαστος·
Ἕκτωρ δ᾽ ἀμφιπεριστρώφα καλλίτριχας ἵππους
Γοργοῦς ὄμματ᾽ ἔχων ἠδὲ βροτολοιγοῦ Ἄρηος.

 

350
τοὺς δὲ ἰδοῦσ᾽ ἐλέησε θεὰ λευκώλενος Ἥρη,
αἶψα δ᾽ Ἀθηναίην ἔπεα πτερόεντα προσηύδα·
ὢ πόποι αἰγιόχοιο Διὸς τέκος οὐκέτι νῶϊ
ὀλλυμένων Δαναῶν κεκαδησόμεθ᾽ ὑστάτιόν περ;
οἵ κεν δὴ κακὸν οἶτον ἀναπλήσαντες ὄλωνται
355
ἀνδρὸς ἑνὸς ῥιπῆι, ὁ δὲ μαίνεται οὐκέτ᾽ ἀνεκτῶς
Ἕκτωρ Πριαμίδης, καὶ δὴ κακὰ πολλὰ ἔοργε.

τὴν δ᾽ αὖτε προσέειπε θεὰ γλαυκῶπις Ἀθήνη·
καὶ λίην οὗτός γε μένος θυμόν τ᾽ ὀλέσειε
χερσὶν ὑπ᾽ Ἀργείων φθίμενος ἐν πατρίδι γαίηι·
360
ἀλλὰ πατὴρ οὑμὸς φρεσὶ μαίνεται οὐκ ἀγαθῆισι
σχέτλιος, αἰὲν ἀλιτρός, ἐμῶν μενέων ἀπερωεύς·
οὐδέ τι τῶν μέμνηται, ὅ οἱ μάλα πολλάκις υἱὸν
τειρόμενον σώεσκον ὑπ᾽ Εὐρυσθῆος ἀέθλων.
ἤτοι ὁ μὲν κλαίεσκε πρὸς οὐρανόν, αὐτὰρ ἐμὲ Ζεὺς
365
τῶι ἐπαλεξήσουσαν ἀπ᾽ οὐρανόθεν προΐαλλεν.
εἰ γὰρ ἐγὼ τάδε ἤιδε᾽ ἐνὶ φρεσὶ πευκαλίμηισιν
εὖτέ μιν εἰς Ἀΐδαο πυλάρταο προὔπεμψεν
ἐξ Ἐρέβευς ἄξοντα κύνα στυγεροῦ Ἀΐδαο,
οὐκ ἂν ὑπεξέφυγε Στυγὸς ὕδατος αἰπὰ ῥέεθρα.
370
νῦν δ᾽ ἐμὲ μὲν στυγέει, Θέτιδος δ᾽ ἐξήνυσε βουλάς,
ἥ οἱ γούνατ᾽ ἔκυσσε καὶ ἔλλαβε χειρὶ γενείου,
λισσομένη τιμῆσαι Ἀχιλλῆα πτολίπορθον.
ἔσται μὰν ὅτ᾽ ἂν αὖτε φίλην γλαυκώπιδα εἴπηι.
ἀλλὰ σὰ μὲν νῦν νῶϊν ἐπέντυε μώνυχας ἵππους,
375
ὄφρ᾽ ἂν ἐγὼ καταδῦσα Διὸς δόμον αἰγιόχοιο
τεύχεσιν ἐς πόλεμον θωρήξομαι, ὄφρα ἴδωμαι
ἢ νῶϊ Πριάμοιο πάϊς κορυθαίολος Ἕκτωρ
γηθήσει προφανέντε ἀνὰ πτολέμοιο γεφύρας,
ἦ τις καὶ Τρώων κορέει κύνας ἠδ᾽ οἰωνοὺς
380
δημῶι καὶ σάρκεσσι, πεσὼν ἐπὶ νηυσὶν Ἀχαιῶν.

ὣς ἔφατ᾽, οὐδ᾽ ἀπίθησε θεὰ λευκώλενος Ἥρη.
ἣ μὲν ἐποιχομένη χρυσάμπυκας ἔντυεν ἵππους
Ἥρη πρέσβα θεὰ θυγάτηρ μεγάλοιο Κρόνοιο·
αὐτὰρ Ἀθηναίη κούρη Διὸς αἰγιόχοιο
385
πέπλον μὲν κατέχευεν ἑανὸν πατρὸς ἐπ᾽ οὔδει
ποικίλον, ὅν ῥ᾽ αὐτὴ ποιήσατο καὶ κάμε χερσίν,
ἣ δὲ χιτῶν᾽ ἐνδῦσα Διὸς νεφεληγερέταο
τεύχεσιν ἐς πόλεμον θωρήσσετο δακρυόεντα.
ἐς δ᾽ ὄχεα φλόγεα ποσὶ βήσετο, λάζετο δ᾽ ἔγχος
390
βριθὺ μέγα στιβαρόν, τῶι δάμνησι στίχας ἀνδρῶν
ἡρώων, τοῖσίν τε κοτέσσεται ὀβριμοπάτρη.
Ἥρη δὲ μάστιγι θοῶς ἐπεμαίετ᾽ ἄρ᾽ ἵππους·
αὐτόμαται δὲ πύλαι μύκον οὐρανοῦ ἃς ἔχον Ὧραι,
τῆις ἐπιτέτραπται μέγας οὐρανὸς Οὔλυμπός τε
395
ἠμὲν ἀνακλῖναι πυκινὸν νέφος ἠδ᾽ ἐπιθεῖναι.
τῆι ῥα δι᾽ αὐτάων κεντρηνεκέας ἔχον ἵππους.

Ζεὺς δὲ πατὴρ Ἴδηθεν ἐπεὶ ἴδε χώσατ᾽ ἄρ᾽ αἰνῶς,
Ἶριν δ᾽ ὄτρυνε χρυσόπτερον ἀγγελέουσαν·
βάσκ᾽ ἴθι Ἶρι ταχεῖα, πάλιν τρέπε μηδ᾽ ἔα ἄντην
400
ἔρχεσθ᾽· οὐ γὰρ καλὰ συνοισόμεθα πτόλεμον δέ.
ὧδε γὰρ ἐξερέω, τὸ δὲ καὶ τετελεσμένον ἔσται·
γυιώσω μέν σφωϊν ὑφ᾽ ἅρμασιν ὠκέας ἵππους,
αὐτὰς δ᾽ ἐκ δίφρου βαλέω κατά θ᾽ ἅρματα ἄξω·
οὐδέ κεν ἐς δεκάτους περιτελλομένους ἐνιαυτοὺς
405
ἕλκε᾽ ἀπαλθήσεσθον, ἅ κεν μάρπτηισι κεραυνός·
ὄφρα ἰδῆι γλαυκῶπις ὅτ᾽ ἂν ὧι πατρὶ μάχηται.
Ἥρηι δ᾽ οὔ τι τόσον νεμεσίζομαι οὐδὲ χολοῦμαι·
αἰεὶ γάρ μοι ἔωθεν ἐνικλᾶν ὅττί κεν εἴπω.

ὣς ἔφατ᾽, ὦρτο δὲ Ἶρις ἀελλόπος ἀγγελέουσα,
410
βῆ δ᾽ ἐξ Ἰδαίων ὀρέων ἐς μακρὸν Ὄλυμπον.
πρώτηισιν δὲ πύληισι πολυπτύχου Οὐλύμποιο
ἀντομένη κατέρυκε, Διὸς δέ σφ᾽ ἔννεπε μῦθον·
πῆι μέματον; τί σφῶϊν ἐνὶ φρεσὶ μαίνεται ἦτορ;
οὐκ ἐάαι Κρονίδης ἐπαμυνέμεν Ἀργείοισιν.
415
ὧδε γὰρ ἠπείλησε Κρόνου πάϊς, ἧι τελέει περ,
γυιώσειν μὲν σφῶϊν ὑφ᾽ ἅρμασιν ὠκέας ἵππους,
αὐτὰς δ᾽ ἐκ δίφρου βαλέειν κατά θ᾽ ἅρματα ἄξειν·
οὐδέ κεν ἐς δεκάτους περιτελλομένους ἐνιαυτοὺς
ἕλκε᾽ ἀπαλθήσεσθον, ἅ κεν μάρπτηισι κεραυνός·
420
ὄφρα ἰδῆις γλαυκῶπι ὅτ᾽ ἂν σῶι πατρὶ μάχηαι.
Ἥρηι δ᾽ οὔ τι τόσον νεμεσίζεται οὐδὲ χολοῦται·
αἰεὶ γάρ οἱ ἔωθεν ἐνικλᾶν ὅττι κεν εἴπηι·
ἀλλὰ σύ γ᾽ αἰνοτάτη κύον ἀδεὲς εἰ ἐτεόν γε
τολμήσεις Διὸς ἄντα πελώριον ἔγχος ἀεῖραι.

 

425
ἣ μὲν ἄρ᾽ ὣς εἰποῦσ᾽ ἀπέβη πόδας ὠκέα Ἶρις,
αὐτὰρ Ἀθηναίην Ἥρη πρὸς μῦθον ἔειπεν·
ὢ πόποι αἰγιόχοιο Διὸς τέκος, οὐκέτ᾽ ἔγωγε
νῶϊ ἐῶ Διὸς ἄντα βροτῶν ἕνεκα πτολεμίζειν·
τῶν ἄλλος μὲν ἀποφθίσθω, ἄλλος δὲ βιώτω,
430
ὅς κε τύχηι· κεῖνος δὲ τὰ ἃ φρονέων ἐνὶ θυμῶι
Τρωσί τε καὶ Δαναοῖσι δικαζέτω, ὡς ἐπιεικές.

ὣς ἄρα φωνήσασα πάλιν τρέπε μώνυχας ἵππους·
τῆισιν δ᾽ Ὧραι μὲν λῦσαν καλλίτριχας ἵππους,
καὶ τοὺς μὲν κατέδησαν ἐπ᾽ ἀμβροσίηισι κάπηισιν,
435
ἅρματα δ᾽ ἔκλιναν πρὸς ἐνώπια παμφανόωντα·
αὐταὶ δὲ χρυσέοισιν ἐπὶ κλισμοῖσι κάθιζον
μίγδ᾽ ἄλλοισι θεοῖσι, φίλον τετιημέναι ἦτορ.

Ζεὺς δὲ πατὴρ Ἴδηθεν ἐΰτροχον ἅρμα καὶ ἵππους
Οὔλυμπον δὲ δίωκε, θεῶν δ᾽ ἐξίκετο θώκους.
440 τῶι δὲ καὶ ἵππους μὲν λῦσε κλυτὸς ἐννοσίγαιος,
ἅρματα δ᾽ ἂμ βωμοῖσι τίθει κατὰ λῖτα πετάσσας·
αὐτὸς δὲ χρύσειον ἐπὶ θρόνον εὐρύοπα Ζεὺς
ἕζετο, τῶι δ᾽ ὑπὸ ποσσὶ μέγας πελεμίζετ᾽ Ὄλυμπος.
αἳ δ᾽ οἶαι Διὸς ἀμφὶς Ἀθηναίη τε καὶ Ἥρη
445 ἥσθην, οὐδέ τί μιν προσεφώνεον οὐδ᾽ ἐρέοντο·
αὐτὰρ ὁ ἔγνω ἧισιν ἐνὶ φρεσὶ φώνησέν τε·
τίφθ᾽ οὕτω τετίησθον Ἀθηναίη τε καὶ Ἥρη;
οὐ μέν θην κάμετόν γε μάχηι ἔνι κυδιανείρηι
ὀλλῦσαι Τρῶας, τοῖσιν κότον αἰνὸν ἔθεσθε.
450 πάντως, οἷον ἐμόν γε μένος καὶ χεῖρες ἄαπτοι,
οὐκ ἄν με τρέψειαν ὅσοι θεοί εἰσ᾽ ἐν Ὀλύμπωι.
σφῶϊν δὲ πρίν περ τρόμος ἔλλαβε φαίδιμα γυῖα
πρὶν πόλεμόν τε ἰδεῖν πολέμοιό τε μέρμερα ἔργα.
ὧδε γὰρ ἐξερέω, τὸ δέ κεν τετελεσμένον ἦεν·
455 οὐκ ἂν ἐφ᾽ ὑμετέρων ὀχέων πληγέντε κεραυνῶι
ἂψ ἐς Ὄλυμπον ἵκεσθον, ἵν᾽ ἀθανάτων ἕδος ἐστίν.

ὣς ἔφαθ᾽, αἳ δ᾽ ἐπέμυξαν Ἀθηναίη τε καὶ Ἥρη·
πλησίαι αἵ γ᾽ ἥσθην, κακὰ δὲ Τρώεσσι μεδέσθην.
ἤτοι Ἀθηναίη ἀκέων ἦν οὐδέ τι εἶπε
460 σκυζομένη Διὶ πατρί, χόλος δέ μιν ἄγριος ἥιρει·
Ἥρηι δ᾽ οὐκ ἔχαδε στῆθος χόλον, ἀλλὰ προσηύδα·
αἰνότατε Κρονίδη ποῖον τὸν μῦθον ἔειπες.
εὖ νυ καὶ ἡμεῖς ἴδμεν ὅ τοι σθένος οὐκ ἀλαπαδνόν·
ἀλλ᾽ ἔμπης Δαναῶν ὀλοφυρόμεθ᾽ αἰχμητάων,
465 οἵ κεν δὴ κακὸν οἶτον ἀναπλήσαντες ὄλωνται.
ἀλλ᾽ ἤτοι πολέμου μὲν ἀφεξόμεθ᾽, εἰ σὺ κελεύεις·
βουλὴν δ᾽ Ἀργείοις ὑποθησόμεθ᾽ ἥ τις ὀνήσει,
ὡς μὴ πάντες ὄλωνται ὀδυσσαμένοιο τεοῖο.

τὴν δ᾽ ἀπαμειβόμενος προσέφη νεφεληγερέτα Ζεύς·
470 ἠοῦς δὴ καὶ μᾶλλον ὑπερμενέα Κρονίωνα
ὄψεαι, αἴ κ᾽ ἐθέληισθα, βοῶπις πότνια Ἥρη
ὀλλύντ᾽ Ἀργείων πουλὺν στρατὸν αἰχμητάων·
οὐ γὰρ πρὶν πολέμου ἀποπαύσεται ὄβριμος Ἕκτωρ
πρὶν ὄρθαι παρὰ ναῦφι ποδώκεα Πηλεΐωνα,
475 ἤματι τῶι ὅτ᾽ ἂν οἳ μὲν ἐπὶ πρύμνηισι μάχωνται
στείνει ἐν αἰνοτάτωι περὶ Πατρόκλοιο θανόντος·
ὣς γὰρ θέσφατόν ἐστι· σέθεν δ᾽ ἐγὼ οὐκ ἀλεγίζω
χωομένης, οὐδ᾽ εἴ κε τὰ νείατα πείραθ᾽ ἵκηαι
γαίης καὶ πόντοιο, ἵν᾽ Ἰάπετός τε Κρόνος τε
480 ἥμενοι οὔτ᾽ αὐγῆις Ὑπερίονος Ἠελίοιο
τέρποντ᾽ οὔτ᾽ ἀνέμοισι, βαθὺς δέ τε Τάρταρος ἀμφίς·
οὐδ᾽ ἢν ἔνθ᾽ ἀφίκηαι ἀλωμένη, οὔ σευ ἔγωγε
σκυζομένης ἀλέγω, ἐπεὶ οὐ σέο κύντερον ἄλλο.

ὣς φάτο, τὸν δ᾽ οὔ τι προσέφη λευκώλενος Ἥρη.
485 ἐν δ᾽ ἔπεσ᾽ Ὠκεανῶι λαμπρὸν φάος ἠελίοιο
ἕλκον νύκτα μέλαιναν ἐπὶ ζείδωρον ἄρουραν.
Τρωσὶν μέν ῥ᾽ ἀέκουσιν ἔδυ φάος, αὐτὰρ Ἀχαιοῖς
ἀσπασίη τρίλλιστος ἐπήλυθε νὺξ ἐρεβεννή.

Τρώων αὖτ᾽ ἀγορὴν ποιήσατο φαίδιμος Ἕκτωρ
490 νόσφι νεῶν ἀγαγὼν ποταμῶι ἔπι δινήεντι,
ἐν καθαρῶι ὅθι δὴ νεκύων διεφαίνετο χῶρος.
ἐξ ἵππων δ᾽ ἀποβάντες ἐπὶ χθόνα μῦθον ἄκουον
τόν ῥ᾽ Ἕκτωρ ἀγόρευε Διῒ φίλος· ἐν δ᾽ ἄρα χειρὶ
ἔγχος ἔχ᾽ ἑνδεκάπηχυ· πάροιθε δὲ λάμπετο δουρὸς
495 αἰχμὴ χαλκείη, περὶ δὲ χρύσεος θέε πόρκης,
τῶι ὅ γ᾽ ἐρεισάμενος ἔπεα Τρώεσσι μετηύδα·
κέκλυτέ μευ Τρῶες καὶ Δάρδανοι ἠδ᾽ ἐπίκουροι·
νῦν ἐφάμην νῆάς τ᾽ ὀλέσας καὶ πάντας Ἀχαιοὺς
ἂψ ἀπονοστήσειν προτὶ Ἴλιον ἠνεμόεσσαν·
500 ἀλλὰ πρὶν κνέφας ἦλθε, τὸ νῦν ἐσάωσε μάλιστα
Ἀργείους καὶ νῆας ἐπὶ ῥηγμῖνι θαλάσσης.
ἀλλ᾽ ἤτοι νῦν μὲν πειθώμεθα νυκτὶ μελαίνηι
δόρπά τ᾽ ἐφοπλισόμεσθα· ἀτὰρ καλλίτριχας ἵππους
λύσαθ᾽ ὑπὲξ ὀχέων, παρὰ δέ σφισι βάλλετ᾽ ἐδωδήν·
505 ἐκ πόλιος δ᾽ ἄξεσθε βόας καὶ ἴφια μῆλα
καρπαλίμως, οἶνον δὲ μελίφρονα οἰνίζεσθε
σῖτόν τ᾽ ἐκ μεγάρων, ἐπὶ δὲ ξύλα πολλὰ λέγεσθε,
ὥς κεν παννύχιοι μέσφ᾽ ἠοῦς ἠριγενείης
καίωμεν πυρὰ πολλά, σέλας δ᾽ εἰς οὐρανὸν ἵκηι,
510 μή πως καὶ διὰ νύκτα κάρη κομόωντες Ἀχαιοὶ
φεύγειν ὁρμήσωνται ἐπ᾽ εὐρέα νῶτα θαλάσσης.
μὴ μὰν ἀσπουδί γε νεῶν ἐπιβαῖεν ἕκηλοι,
ἀλλ᾽ ὥς τις τούτων γε βέλος καὶ οἴκοθι πέσσηι
βλήμενος ἢ ἰῶι ἢ ἔγχεϊ ὀξυόεντι
515 νηὸς ἐπιθρώισκων, ἵνα τις στυγέηισι καὶ ἄλλος
Τρωσὶν ἐφ᾽ ἱπποδάμοισι φέρειν πολύδακρυν Ἄρηα.
κήρυκες δ᾽ ἀνὰ ἄστυ Διῒ φίλοι ἀγγελλόντων
παῖδας πρωθήβας πολιοκροτάφους τε γέροντας
λέξασθαι περὶ ἄστυ θεοδμήτων ἐπὶ πύργων·
520 θηλύτεραι δὲ γυναῖκες ἐνὶ μεγάροισιν ἑκάστη
πῦρ μέγα καιόντων· φυλακὴ δέ τις ἔμπεδος ἔστω
μὴ λόχος εἰσέλθηισι πόλιν λαῶν ἀπεόντων.
ὧδ᾽ ἔστω Τρῶες μεγαλήτορες ὡς ἀγορεύω·
μῦθος δ᾽ ὃς μὲν νῦν ὑγιὴς εἰρημένος ἔστω,
525 τὸν δ᾽ ἠοῦς Τρώεσσι μεθ᾽ ἱπποδάμοις ἀγορεύσω.
ἔλπομαι εὐχόμενος Διί τ᾽ ἄλλοισίν τε θεοῖσιν
ἐξελάαν ἐνθένδε κύνας κηρεσσιφορήτους,
οὓς κῆρες φορέουσι μελαινάων ἐπὶ νηῶν.
ἀλλ᾽ ἤτοι ἐπὶ νυκτὶ φυλάξομεν ἡμέας αὐτούς,
530 πρῶϊ δ᾽ ὑπηοῖοι σὺν τεύχεσι θωρηχθέντες
νηυσὶν ἔπι γλαφυρῆισιν ἐγείρομεν ὀξὺν Ἄρηα.
εἴσομαι εἴ κέ μ᾽ ὁ Τυδεΐδης κρατερὸς Διομήδης
πὰρ νηῶν πρὸς τεῖχος ἀπώσεται, ἤ κεν ἐγὼ τὸν
χαλκῶι δηιώσας ἔναρα βροτόεντα φέρωμαι.
535 αὔριον ἣν ἀρετὴν διαείσεται, εἴ κ᾽ ἐμὸν ἔγχος
μείνηι ἐπερχόμενον· ἀλλ᾽ ἐν πρώτοισιν ὀΐω
κείσεται οὐτηθείς, πολέες δ᾽ ἀμφ᾽ αὐτὸν ἑταῖροι
ἠελίου ἀνιόντος ἐς αὔριον· εἰ γὰρ ἐγὼν ὣς
εἴην ἀθάνατος καὶ ἀγήρως ἤματα πάντα,
540 τιοίμην δ᾽ ὡς τίετ᾽ Ἀθηναίη καὶ Ἀπόλλων,
ὡς νῦν ἡμέρη ἥδε κακὸν φέρει Ἀργείοισιν.

ὣς Ἕκτωρ ἀγόρευ᾽, ἐπὶ δὲ Τρῶες κελάδησαν.
οἳ δ᾽ ἵππους μὲν λῦσαν ὑπὸ ζυγοῦ ἱδρώοντας,
δῆσαν δ᾽ ἱμάντεσσι παρ᾽ ἅρμασιν οἷσιν ἕκαστος·
545 ἐκ πόλιος δ᾽ ἄξοντο βόας καὶ ἴφια μῆλα
καρπαλίμως, οἶνον δὲ μελίφρονα οἰνίζοντο,
σῖτόν τ᾽ ἐκ μεγάρων, ἐπὶ δὲ ξύλα πολλὰ λέγοντο.
κνίσην δ᾽ ἐκ πεδίου ἄνεμοι φέρον οὐρανὸν εἴσω.
οἳ δὲ μέγα φρονέοντες ἐπὶ πτολέμοιο γεφύρας
εἴατο παννύχιοι, πυρὰ δέ σφισι καίετο πολλά.
550 ὡς δ᾽ ὅτ᾽ ἐν οὐρανῶι ἄστρα φαεινὴν ἀμφὶ σελήνην
φαίνετ᾽ ἀριπρεπέα, ὅτε τ᾽ ἔπλετο νήνεμος αἰθήρ·
ἔκ τ᾽ ἔφανεν πᾶσαι σκοπιαὶ καὶ πρώονες ἄκροι
καὶ νάπαι· οὐρανόθεν δ᾽ ἄρ᾽ ὑπερράγη ἄσπετος αἰθήρ,
πάντα δὲ εἴδεται ἄστρα, γέγηθε δέ τε φρένα ποιμήν·
555 ὡς δ᾽ ὅτ᾽ ἐν οὐρανῶι ἄστρα φαεινὴν ἀμφὶ σελήνην
φαίνετ᾽ ἀριπρεπέα, ὅτε τ᾽ ἔπλετο νήνεμος αἰθήρ·
ἔκ τ᾽ ἔφανεν πᾶσαι σκοπιαὶ καὶ πρώονες ἄκροι
καὶ νάπαι· οὐρανόθεν δ᾽ ἄρ᾽ ὑπερράγη ἄσπετος αἰθήρ,
πάντα δὲ εἴδεται ἄστρα, γέγηθε δέ τε φρένα ποιμήν·
560 τόσσα μεσηγὺ νεῶν ἠδὲ Ξάνθοιο ῥοάων
Τρώων καιόντων πυρὰ φαίνετο Ἰλιόθι πρό.
χίλι᾽ ἄρ᾽ ἐν πεδίωι πυρὰ καίετο, πὰρ δὲ ἑκάστωι
εἴατο πεντήκοντα σέλαι πυρὸς αἰθομένοιο.
ἵπποι δὲ κρῖ λευκὸν ἐρεπτόμενοι καὶ ὀλύρας
565 ἑσταότες παρ᾽ ὄχεσφιν ἐΰθρονον Ἠῶ μίμνον.