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ARGUMENT DU LIVRE VII.
Nausicaa retourne au palais. Ulysse marchait vers la ville, quand
Minerve, sous la figure d'une jeune fille, lui appareil, & le conduit au
palais d'Alcinoüs. Description du palais & des jardins du Roi. Ulysse
tombe aux genoux de la Reine, & implore son secours ; Alcinoüs le relève
& lui promet son assistance. La Reine le questionne sur les habits dont
elle le voit vêtu ; Ulysse satisfait à ses questions par le récit de ses
malheurs depuis son départ de l'île de Calypso.
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La Nymphe
cependant traversant la Cité (1)
Approche du séjour
par son Père habité,
S'arrête vers la
porte, & voit voler vers elle
Ses Frères, qui,
brûlant de lui marquer leur zèle,
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5
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Semblables à des
Dieux par leur taille & leurs traits
Vont enfermer son
char au fond de ce palais.
En son réduit
secret la Nymphe se retire ;
Une femme la suit,
qui, sur les bords d'Épire,
Jadis de l'esclavage
avoit subi la loi.
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10
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Par les Phaeaciens
livrée aux mains du Roi,
De la jeune
Princesse elle nourrit l'enfance,
Et par de tendres
soins gagna sa confiance.
Eurymède est son nom
; c'est elle dont la main
Va de Nausicaa
préparer le festin.
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15
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Ulysse en ce
moment, loin du sacré bocage,
S'avançoit vers la
ville, entouré d'un nuage (2).
Que Pallas, du Héros
l'espérance & l'appui,
A fait du haut des
airs descendre autour de lui,
Pour le cacher aux
yeux d'une foule importune,
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20
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Qui pourroit, sans
égard, insulter sa fortune,
Et dont le vain
orgueil, prompt à l'interroger,
N'apprendrait ses
malheurs que pour mieux l'outrager.
Il approche, &
soudain devant lui se présente,
Dans un simple
appareil, une Beauté charmante.
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25
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Une urne sur la
tête, elle avance à grands pas.
Sous ce déguisement
c'est la sage Pallas.
Ma Fille, lui
dit-il, quelle route assurée
Peut conduire au
séjour des Rois de la contrée ?
Je suis un étranger
du Sort persécuté,
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30
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J'ignore dans quels
lieux les Destins m'ont jeté.
Inconnu, c'est à
vous qu'un malheureux s'adresse.
Respectable
Étranger, répondit la Déesse,
Venez, suivez mes
pas. Qui pourroit mieux que moi
Vous conduire au
palais qu'habite notre Roi ?
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35
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Ce palais est voisin
du séjour de mon Père.
Mais gardez en
marchant un silence sévère ;
Craignez
d'interroger ce peuple, dont l'orgueil
N'offriroit à vos
yeux qu'un froid & dur accueil ;
Tout fier de
subjuguer le maritime empire.
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40
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Sur des Vaisseaux
légers, plus prompts que le Zéphyre,
Plus prompts que la
pensée, on ne le vit jamais
Verser sur
l'Étranger ses dons & ses bienfaits.
En achevant ces
mots la Déesse s'avance ;
Le Héros obéit, & la
suit en silence,
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45
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Trouve un peuple
nombreux en ces lieux répandu,
En traverse les
flots, le voit sans être vu ;
Tant la sage Déesse,
à ses vœux favorable,
L'avoit enveloppé
d'un voile impénétrable ?
Il voit des deux
côtés qui bordent le chemin (3),
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50
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Les Navires rangés
dans un vaste bassin ;
Il trouve sur ses
pas un magnifique temple,
Des remparts élevés
qu'à loisir il contemple ;
Mais quand,
d'Alcinoüs abordant le palais,
Ulysse y promena ses
regards satisfaits,
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55
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Minerve par ces mots
s'empressa de l'instruire :
J’ai, dit-elle,
en ces lieux promis de vous conduire,
Voilà de notre Roi
le superbe séjour :
Vous l'allez voir ce
Prince entouré de sa Cour,
Au milieu du festin
d'une brillante fête ;
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60
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Allez, ne craignez
rien, que rien ne vous arrête.
Une noble assurance
ouvre un facile accès (4)
Et peut d'un inconnu
préparer les succès.
Allez donc, &
bientôt, pour calmer votre peine,
Arête, c'est le nom
que l'on donne à la Reine,
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65
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L'adorable Arête va
s'offrir à vos yeux ;
Le sang l'unit au
Roi par les plus tendres nœuds,
Et du flambeau
d'Hymen la favorable flamme
De ces liens sacrés
a resserré la trame.
Fils du Tyran des
mers, jadis Nausithous
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70
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Compta parmi ses
fils le sage Alcinoüs,
Qui, d'un frère
expiré relevant la famille,
Se fit la douce loi
d'en épouser la Fille.
Depuis l'instant
heureux qu'il l'admit à son lit,
Son cœur plus
tendrement tous les jours la chérit,
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75
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Lui porte des
respects que jamais sur la terre
Ne reçut d'un Époux
l'Épouse la plus chère.
Mais ces affections,
& ce parfait amour,
Tout les ressent
pour elle en ce charmant séjour ;
Ses enfans & son
peuple à l'envi la révèrent.
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80
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Que d'encens, que
d'honneurs tous les cœurs lui défèrent,
Quand, daignant de
ses yeux parcourir sa Cité,
Elle vient, à l'égal
d'une Divinité,
Verser sur la vertu
ses bontés maternelles,
Calmer les
différends, dissiper les querelles,
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85
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Et, d'un esprit
modeste, & noble sans orgueil,
Rendre tous ses
Sujets heureux par son accueil !
Puissiez-vous
trouver grâce en son ame attendrie ;
Bientôt le doux
espoir de voir votre patrie,
D'embrasser vos
parens, vos foyers, vos amis,
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90
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Cet espoir si
flatteur va vous être permis.
Elle achevoit
ces mots, lorsque d'un vol rapide
Elle s'élève en
l'air, franchit la plaine humide
Des rives de Schérie
aux champs de Marathon,
Arrive dans Athène,
&, d'un pas aussi prompt
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95
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Se retire en son
temple, où jadis sa tendresse
Du fameux Érechthée
éleva la jeunesse.
Les yeux
d'Ulysse alors étonnés & ravis,
Du palais qu'il
aborde, admirent le parvis ;
Il s'arrête un
moment sur le seuil du portique ;
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100
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Il contemple à
loisir ce palais magnifique,
Séjour
resplendissant, dont l'éclat est pareil
Aux feux que dans
les airs fait jaillir le Soleil,
Et pourrait effacer
la brillante lumière
Dont l'astre de la
nuit embellit sa carrière.
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105
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Là s'ouvre &
s'arrondit une superbe cour ;
Un vaste mur
d'airain en forme le contour,
Qu'un acier azuré de
tous côtés couronne.
Là brille le palais
que ce mur environne (5)
Fermé de portes d'or
que sur un seuil d'airain
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110
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Portoient des gonds
d'argent travaillés par Vulcain.
Mais de ce Dieu
puissant l'immortelle industrie
Sur deux fiers
animaux signala son génie ;
Deux chiens d'or &
d'argent que ses mains ont formés,
De l'immortalité
paroissent animés,
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115
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Et du palais du Roi
semblent garder l'entrée.
Là se découvre enfin
une salle, entourée
De trônes éclatans,
où, jetés avec art,
De superbes tapis
brillent de toute part.
Là les Chefs de
l'État, la fleur de la jeunesse,
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120
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Au plaisir des
festins s'abandonnent sans cesse ;
La nuit ne sauroit
même en arrêter le cours.
Sur des trépiés
dorés sont placés des Amours,
Qui, portant dans
leurs mains une torche allumée,
Éclairent des
banquets la pompe accoutumée.
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125
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Par des femmes en
foule on voit incessamment
Sous le poids de la
meule écraser le froment,
Tandis que d'autres
mains à d'autres soins livrées,
S'occupent à tisser
des laines préparées,
Ou, sous leurs
doigts légers, sont tourner leurs fuseaux,
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130
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Comme on voit
s'agiter les feuilles des rameaux (6)
Qu'un peuplier
présente au souffle du Zéphyre,
Minerve dans cet art
a daigné les instruire.
Autant que dans ces
lieux les bras des Matelots
Excelloient à voguer
sur l'empire des flots,
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135
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Autant s'y
distinguoient les soins constans des femmes
Dans l'art d'ouvrer
la laine & d'en orner les trames.
Non loin des
portes d'or de ce brillant palais
Est un jardin fermé
par des buissons épais.
Jamais sur les
trésors de cette heureuse enceinte
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140
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Le fougueux Aquilon
n'osa porter d'atteinte.
Des arbres élevés
qui bravent les hivers,
Y forment à l'envi
des berceaux toujours verds ;
Là, près des fruits
dorés que le pommier présente,
Brille de l'olivier
la tête fleurissante ;
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145
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La cime du poirier à
l'oranger s'unit ;
La douceur de la
figue y croît & s'y nourrit ;
Chaque jour le
Zéphyre y produit & féconde
Mille fruits
différens dont ce jardin abonde ;
Chaque saison y
donne avec égalité,
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150
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Et les fleurs du
Printemps, & les fruits de l'Été
La poire en
vieillissant en voit d'autres renaître,
Sous la figue
flétrie une autre va paraître,
Et, sur le même cep
où le raisin mûrit,
Un raisin dans sa
fleur déjà se reproduit ;
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155
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Une vigne abondante
offre toute l'année
Les festons
jaunissans dont elle est couronnée.
Là, dans un lieu
frappé des rayons du Soleil,
L'heureux
Cultivateur sèche un raisin vermeil.
Ici des Vendangeurs,
sur de larges corbeilles,
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160
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Vont porter au
pressoir la dépouille des treilles,
Mais un nouveau
raisin, de la fleur échappé,
Rend aux pampres
verdis le fruit qu'on a coupé.
Non loin de ces
vergers une aimable industrie
De quarrés alignés
forma la symétrie,
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165
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Où les sillons,
remplis de végétaux divers,
Offrent à l'œil
charmé des tapis toujours verts.
On y voit sourciller
deux fontaines fécondes,
Dont l'une en ces
jardins va promener ses ondes,
Et l'autre, sous la
terre, en un profond canal,
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170
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Aux bains de la Cité
va verser son crystal (7).
Quand le Fils de
Laërte, enchanté, l'ame émue,
Eut de ces lieux
charmans rassasis sa vue,
Il franchit, à
grands pas, le seuil de ce séjour ;
Il entre, & voit le
Prince & les Grands de sa Cour.
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175
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Chacun d'eux à
Mercure adressant sa prière,
De ses libations
épanchoit la dernière.
La nuit les invitoit
à goûter le repos ;
Ils vont se séparer,
quand le sage Héros
S'avance, enveloppé
de cette épaisse nue
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180
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Que la main de
Minerve a sur lui répandue,
Passe devant le Roi,
tombe aux pieds d'Arête,
Se prosterne ;
aussitôt le nuage écarté (8)
Laisse voir un
Mortel aux genoux de la Reine.
Chacun se tait,
frappé d'une terreur soudaine.
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185
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Reine, dit le
Héros, j'embrasse vos genoux,
Je viens vous
implorer & vous & votre Époux,
Et ces Mortels
heureux assis à votre table.
Que la bonté des
Dieux, à mes vœux favorable,
Répande le bonheur
sur le cours de vos ans !
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190
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Vivez long-temps
heureux, & puissent vos enfans (9)
De leurs aïeux en
paix recueillir l'héritage !
Mais, touchés de mes
maux, daignez de ce rivage
Me renvoyer bientôt
aux bords où je suis né,
Et dont un sort
cruel m'a long-temps éloigné.
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195
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Le sage Ulysse
ainsi terminant sa prière,
Approche des foyers,
& s'assied sur la terre,
Attend, les yeux
baissés, l'arrêt de son destin.
Le silence régnoit ;
mais Echéneus enfin,
Échéneus, ce Héros
dont l'aimable vieillesse
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200
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Possedoit les
trésors d'une utile sagesse,
Réclama les devoirs
de l'hospitalité.
Alcinoüs,
dit-il, la voix de l'équité,
Après les vœux
touchans que vous venez d'entendre,
Défend qu'un
Étranger soit assis sur la cendre.
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205
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Ces Princes, en
suspens, fixent les yeux sur vous.
Relevez ce Mortel,
placez-le parmi nous,
Vers un trône
éclatant conduisez-le vous-même.
Faites remplir la
coupe, offrons au Dieu suprême
De nos libations
l'hommage consacré.
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210
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Honorons tous le
Dieu puissant & révéré,
Dont le bras
secourable, armé de son égide,
Conduit les pas
errans de l'indigent timide.
Alcinoüs
l'écoute, il se lève, & soudain
Aborde l'Étranger,
lui présente la main,
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215
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L'admet à ses côtés
dans la place honorable
De l'aîné de ses
fils, qu'il assit à sa table.
D'autres mets sont
servis. Tandis que le Héros
Va réparer ses sens
épuisés par ses maux,
Le Monarque,
implorant le Maître du tonnerre,
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220
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De ses libations
arrose la poussière.
Les Princes
imitoient l'exemple de leur Roi ;
Quand ce Monarque
enfin : « Amis, écoutez-moi,
Séparons-nous, allez
où la nuit vous rappelle ;
Mais demain, que
l'Aurore éveillant votre zèle
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225
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Rassemble sur vos
pas nos augustes Vieillards :
Venez à ce Mortel
prodiguer vos égards,
Le flatter,
l'assurer de vos secours propices,
Préparer pour les
Dieux de pompeux sacrifices,
Et consulter comment
sur un Vaisseau léger,
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230
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Écartant loin de lui
la peine & le danger,
Nos soins pourront
bientôt le rendre à sa patrie,
Affranchi des
tourmens qui menaçoient sa vie.
Fallût-il le porter
sur les plus vastes mers,
Nous le ramènerons
aux lieux qui lui sont chers.
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235
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Là, ses jours,
conservés par nos soins favorables,
Rentreront au
pouvoir des Parques redoutables,
Sous le joug du
destin que leurs mains ont tissu
A l'instant que sa
mère en ses flancs sa conçu....
Peut-être e'est un
Dieu, qui, des célestes plages,
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240
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Vient, pour nous
éprouver, visiter ces rivages,
Souvent à nos
regards les Dieux se sont offerts,
Mais aucun voile
encor ne les avoit couverts (10);
Soit qu'assis parmi
nous, à nos desirs propices,
Ils vinssent
recevoir l'encens des sacrifices :
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245
|
Soit que, nous
prodiguant leur plus douce saveur,
Ils daignassent
guider les pas du Voyageur.
De leurs soins en
effet l'adorable assistance
De nous aux
Immortels laisse moins de distance,
Ils sont moins
éloignés de nos cœurs bienfaisans
|
250
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Que les Géans
affreux des Cyclopes sanglans (11).
Renoncez, dit
Ulysse, à ce soupçon profane,
Que l'examen
détruit, que la raison condamne.
Quels traits de
ressemblance entre les Dieux & moi
Ont pu, trompant vos
yeux, abuser votre foi !
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255
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Loin de voir en mes
traits ces Dieux que je révère
Comparez-moi plutôt
à tout ce que la terre
A vu chez les
Mortels de plus infortuné (12),
Que je détromperois
votre esprit étonné,
Si, de mes maux
partes rappelant la mémoire,
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260
|
Je vous en racontois
la déplorable histoire !
Mais un besoin
pressant, plus sort que ce desir,
D'un triste & long
récit m'enlève le loisir.
La faim aux
malheureux commande en souveraine,
Contre ses
aiguillons la résistance est vaine ;
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265
|
Au sein même des
pleurs, au sein du désespoir
Il faut encor céder
à son fatal pouvoir ;
Il faut oublier
tout, regrets, fonds, alarmes,
Et contenter sa rage
en s'abreuvant de larmes.
Souffrez donc qu'un
instant ranimant mes esprits,
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270
|
J'écarte de mon cœur
la peine & les ennuis ;
Et si sur mes
malheurs votre ame est attendrie,
Hâtez-vous de me
rendre aux vœux de ma patrie;
Content, si je
pouvois, à mon dernier soupir,
Embrasser son
rivage, & la voir, & mourir.
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275
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Il dit, & tous
les Chefs que ce banquet rassemble,
A sa tendre prière
applaudissent ensemble,
Par des libations
terminent le festin,
Et vont, en
attendant le retour du matin,
Des vapeurs du
sommeil goûter la douce ivresse,
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280
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D'esclaves diligens
une foule s’empresse ;
On dessert ; & le
Roi, seul avec Arête,
Demeure près
d'Ulysse, assis à son côté.
D'aucun témoin
fâcheux l'importune présence
Ne les contraindra
plus à garder le silence.
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285
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La Reine va parler;
déjà ses yeux surpris
Avoient de
l'Étranger reconnu les habits ;
Ces habits dont
jadis, de ses femmes aidée,
Elle forma la trame
artistement brodée.
Elle regarde Ulysse,
& veut l'interroger.
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290
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Contentez nos
desirs, généreux Étranger,
Dit-elle, pardonnez
à notre impatience ;
Quel pays, quels
parens vous ont donné naissance !
De qui reçûtes-vous
ces habits somptueux,
Vous, que de longs
malheurs ont conduit en ces lieux.
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295
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Ulysse lui
répond : « O respectable Reine,
Ces malheurs, dont
le Ciel forma la triste chaîne,
A mes sens accablés
offrent un long récit,
Qui pourroit
aisément fatiguer votre esprit.
Mais je vais vous
répondre, & vous allez entendre
|
300
|
Ce que sur mes
destins vous desirez d'apprendre.
Il est au sein
des mers un séjour écarté,
Que nul Dieu, nul
Mortel n'a jamais fréquenté,
Où la fille d'Atlas,
Nymphe trompeuse & vaine,
La belle Calypso,
réside en souveraine.
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305
|
Ce fut là que les
mers, déchirant mon Vaisseau,
De tous mes
Compagnons devinrent le tombeau ;
Que le Ciel en
courroux déchaîna sur ma tête,
Les vents impétueux,
la foudre & la tempête ;
Et que seul,
rappelant ma force & mes esprits,
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310
|
Du Vaisseau fracassé
je saisis les débris.
J'osai lutter neuf
jours contre la destinée,
Et déjà s'achevoit
la dixième journée,
Quand par l'onde &
les vents je me trouvai porté
Au séjour enchanteur
par la Nymphe habité.
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315
|
Calypso me reçut;
cette belle Déesse
Me prodigua ses
soins, ses secours, sa tendresse,
Jura que son amour
affranchiroit mon sort
Du poids de la
vieillesse & des traits de la mort.
A ses discours
flatteurs, à sa voix douce & tendre,
|
320
|
Mon cœur, toujours
confiant, refusa de se rendre (13).
Dans cette île
enfermé je demeurai sept ans,
Arrosant de mes
pleurs les riches vêtemens
Que je devois aux
soins de sa bonté cruelle ;
Mais Je temps arriva
que la fière Immortelle,
|
325
|
Favorable à mes
vœux, fécondant mon desir,
Vint enfin
m'ordonner, me presser de partir ;
Soit qu'un ordre du
Ciel eût vaincu sa confiance,
Soit que, las de mes
pleurs & de ma résistance,
Son cœur superbe &
vain de lui-même eût changé.
|
330
|
Sur un léger radeau,
de ses présens chargé,
Favorisé des vents
qu'ordonna la Déesse,
Je partis, je
quittai son île enchanteresse.
Dix-huit fois le
Soleil chassa la nuit des Cieux ;
Enfin je vis votre
île & ses monts sourcilleux ;
|
335
|
Mon cœur qui s'abusoit
en tressaillit de joie.
J'ignorois de quels
maux j'allois être la proie,
Quels tourmens m'apprêtoit
le Souverain des mers,
Qui, rassemblant les
Vents déchaînés dans les airs,
Par des flots
entassés me ferma le passage,
|
340
|
Et vint de mon
radeau consommer le naufrage.
Sur cette vaste
plaine où je nageai long-temps,
Je devins le jouet &
des flots & des vents.
Vers ces bords
desirés vainement je m'approche,
Je n'y vois qu'un
écueil, qu'une effroyable roche,
|
345
|
Où les flots
courroucés redoublant leurs efforts,
Alloient m'ensevelir
& déchirer mon corps.
Je résiste à leur
choc, &, côtoyant la rive,
Je sors de ce péril,
je m'efforce, j'arrive
Vers un bord plus
facile, où, comme un pur crystal,
|
350
|
Un fleuve s'épanchoit,
d'un cours toujours égal.
Au sein du lit
profond de son onde tranquille,
Contre les vents
enfin je trouve un sur asyle.
Je m'élance au
rivage & rappelle mes sens.
La nuit chassoit du
jour les rayons languissans ;
|
355
|
J'allai des bois
voisins gagner l'épais ombragé.
Là, couché sur un
lit de mousse & de seuillage,
Je goûtai les
saveurs d'un long & doux sommeil,
Que ne put dissiper
le retour du Soleil.
Déjà son char
touchoit au bout de sa carrière,
|
360
|
Quand du sein du
repos je rouvris la paupière ;
J'aperçus vers les
bords où j'étois descendu
Un essaim de Beautés
en ces lieux répandu.
Votre Fille à mes
yeux brilloit au milieu d'elles,
Ainsi qu'une Déesse
au milieu des Mortelles.
|
365
|
Ma suppliante voix
implora sa bonté.
Combien son noble
cœur répond à sa beauté !
Qui l'eût jamais
pensé, qu'avec tant de jeunesse
Ce cœur d'un âge mûr
possédât la sagesse !
Dans le printemps de
l'âge on fuit peu la raison ;
|
370
|
Mais déjà ses vertus
devancent leur saison.
Sensible à mes
malheurs, elle daigna m'entendre,
Me donna tous les
soins que je pouvois attendre,
Par quelques alimens
répara mes esprits,
Et remit en mes
mains ces somptueux habits
|
375
|
O Reine ! vous avez
de ma bouche sincère
Entendu le récit que
j'avois à vous faire.
Étranger, dit le
Roi, pour vous mieux accueillir,
Il restoit à ma
Fille un devoir à remplir.
De ses Femmes suivie, elle eût dû la première
|
380
|
Guider vos pas
errans au palais de son Père (14).
Mais Ulysse aussitôt, avec vivacité
D'un voile officieux
couvrant la vérité (15):
Gardez-vous
d'accuser cette Princesse aimable
D'un tort léger,
dit-il, dont je fuis seul coupable.
|
385
|
Pour m'amener vers
vous, o respectable Roi,
Elle même s'offroit
à marcher devant moi ;
Mais, le cœur
prévenu d'un respect trop sévère,
En la suivant ici,
j'ai craint de vous déplaire ;
Car l'envie odieuse
& les soupçons cruels
|
390
|
Gouvernent en tyrans
la race des mortels.
Il dit ;
Alcinoüs s'empresse de répondre :
Généreux
Étranger, gardez de me confondre
Avec ces hommes
vains, injustes & jaloux
Dont un soupçon
frivole allume le courroux.
|
395
|
Le parti le plus
juste est toujours le plus sage.
Plût aux Dieux
immortels qu'en cet heureux rivage
Votre amitié me vît
tel qu'ici je vous voi ;
Que le plus doux
lien m'assurât votre foi ;
Que le nœud de
l'hymen vous unît à ma Fille (16);
|
400
|
Qu'héritier de mes
biens, appui de ma famille,
Mon Gendre consentît
d'habiter ces climats !
Mais contraindre vos
vœux, mais enchaîner vos pas,
Me préserve le Ciel
d'en avoir la pensée !
Allez ; déjà la
nuit, dans sa courte avancée,
|
405
|
Vous invite avec
nous aux douceurs du sommeil ;
Et demain, prévenant
le retour du Soleil,
Vous me verrez hâter
les apprêts du Navire,
Où, franchisant les
mers, on saura vous conduire
Vers les heureux
climats, objets de tous vos vœux,
|
410
|
Fussent-ils séparés
de ces paisibles lieux
Plus que les bords
d'Eubée, où jadis Rhadamante (17)
Fut conduit par nos
soins sur la mer écumante.
Il visita Titye, &
se vit de retour
Avant que le Soleil
eût achevé son tour.
|
415
|
Vous verrez si
jamais & Rameurs, & Navire,
Ont d'un vol plus
léger franchi l'humide empire.
Ulysse à ce
discours, transporté de plaisir,
Invoque Jupiter, &
pousse un long soupir :
Grand Dieu !
qu'Alcinoüs, fidèle à sa parole,
|
420
|
N'abuse point mon
cœur par un espoir frivole !
Son immortel renom
remplira l'Univers,
Et mon œil reverra
les lieux qui me sont chers.
Les Femmes
cependant, sous le vaste portique,
Dressoient un lit
couvert d'un tapis magnifique :
|
425
|
Ulysse au même
instant par ces Femmes conduit,
Y va goûter en paix
le repos de la nuit ;
Tandis qu'Alcinoüs,
que le sommeil appelle,
Va partager le lit
d'une épouse fidèle (18).
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Notes, explications et commentaires
(1) Avant que
d'entrer dans les récits que les Livres suivans
renferment, le Traducteur Anglais a cru devoir
prévenir son Lecteur que les Poemes d'Homère
tenoient autant à la vérité qu'à la fiction, &
que jusque dans les choses les plus
extraordinaires, comme dans l'aventure des
Cyclopes, dont il sera bientôt question, il y
avoit un mélange de vérité historique, dont
quelque tradition populaire étoit le fondement.
Nous avons déjà suffisamment appuyé sur ces
réflexions dans la Préface & dans les Notes de
l'Iliade, & nous croyons inutile de les répéter
ici.
(2) Virgile a cru
devoir, à l'exemple d'Homère, rendre son Héros
invisible lorsqu'il arrive à Carthage.
At Venus obscuro gradientes aëre sepsit,
Et multo nebulœ circian Dea sudit amictu,
Cernere ne quis eos, neu quis contingere posset,
Molirive moram aut veniendi poscere causas.
Quand il s'agit d'élégance & d'harmonie, Virgile
est quelquefois en état de jouter contre Homère avec
avantage ; mais comparez les motifs que l'un &
l'autre donnent aux actions qu'ils décrivent, c'est
alors que vous reconnoîtrez la différence de
l'original & de la copie. Les motifs de Vénus, qui
couvre Énée d'un nuage, ne sont point préparés, ils
sont foibles : Vénus craint qu'on ne le voie, qu'on
ne le touche, qu'on ne l'arrête, & qu'on ne
l'interroge. Voyez ensuite les motifs de Pallas, ils
portent sur le caractère insolent & vain de ce
peuple de navigateurs, & ce caractère a déjà été
annoncé dans le Livre précédent. C'est cet art des
préparations qui étonne & ravit dans Homère, & que
ne sauroient assez méditer ceux qui se consacrent à
quelque genre d'écrire que ce soit.
(3) Voilà le passage
qui justifie l'interprétation que j'ai donnée dans
le Livre précédent, de la description topographique
de la ville des Phœaciens.
(4) Combien
l'expérience ne démontre-t-elle pas la vérité de
cette maxime ! Il sembleroit qu'Homère eût éprouvé
par lui-même combien l'extrême modestie obscurcit le
talent ; car ce n'est pas la seule réflexion qu'il
sait sur cette pudeur naturelle, qui, comme il le
dit lui-même, sert & nuit tant aux hommes,
Qu'on me permette cette réflexion : Homère modeste &
timide ! à qui sera-t-il donc permis de ne le pas
être ?
(5) Quelques
Critiques, sans jugement & sans goût, ont voulu
censurer cette description du palais d'Alcinoüs, en
la regardant comme inutile à sa marche du Poëme.
Pope justifie Homère, en disant que si c'est une
faute, c'est une faute trop aimable pour ne la lui
pardonner pas, & que c'est dans cette occasion qu'on
peut particulièrement appliquer à Homère l'épithète
que lui donne St Augustin, dulcissimè vanus.
Mais Pope pouvoit ajouter que l'intention de
l'Odyssée étoit de montrer un Roi tourmenté du désir
de revoir sa Femme, son Fils & sa Patrie, &
surmontant tous les obstacles qui l'arrêtent : il
falloit que ces obstacles fussent de plusieurs
genres différens, pour Je mieux éprouver; que tantôt
Calypso cherchât à le séduire par la promesse de
l'immortalité ; que tantôt Nausicaa s'offrit à lui
avec toutes les grâces qu'une ingénuité charmante
peut prêter à la beauté ; que l'île des Phaeaciens &
le palais d'Alcinoüs renfermassent tout ce qui peut
éblouir les yeux d'un Étranger, & lui faire desirer
d'y fixer sa demeure. Voilà les vrais & les plus
grands obstacles qu'Ulysse avoit à vaincre. Ceux
qui venoient de la Fortune & qui ne demandoient que
de la bravoure, étoient moins dangereux.
(6) Quelle fraîcheur,
quelle grâce charmante dans cette comparaison !
Comme Homère avoit senti les beautés de la Nature !
Un peuplier dont le Zéphyre agite légèrement le
feuillage, lui vient sur le champ dans la pensée,
pour peindre la facile activité de ces jeunes mains
occupées à remuer leurs fuseaux.
(7) Telle est,
dit Rousseau, au IV° Livre d'Émile, la
description du jardin royal d'Alcinoüs, dans lequel,
à la honte de ce vieux rêveur d'Homère, & des
Princes de son temps, on ne voit ni treillages, ni
statues, ni cascades, ni boulingrins.
En citant ici Rousseau, je dois prévenir ceux qui
croient curieux de voir la traduction qu'il donne
du passage d'Homère, qu'elle n'est pas tout-à-fait
exacte, & que si la mienne est un peu étendue, la
sienne est un peu trop resserrée. On trouve
d'ailleurs dans sa traduction des méprises qui
viennent de la version latine qu'il a consultée ;
comme lorsqu'il dit qu'à l'extrémité du jardin il y
a deux quarrés couverts de fleurs ; ce sont
deux quarrés de potagers qui verdissent
continuellement,
έπηετανὁν γανόωσα
(vers 128).
La version latine rend cette expression par ces
mots, perenne floretes ; & c'est ce qui a
trompé Rousseau. Il y a d'autres méprises encore
qu'il est inutile de relever, mais dont je crois
devoir Amplement avertir, pour me défendre contre la
critique de ceux qui connoissent mieux Rousseau
qu'Homère, & qui jugeroient ma traduction d'après
celle de cet illustre Écrivain.
(8) Si l'on veut
connoître un de ces endroits où Virgile paroît avoir
embelli Homère, on peut citer celui-ci : c'est-là
qu'on voit l'élégance du Poëte Latin l'emporter sur
la simplicité du Poëte Grec :
Vix ea satus erat, cùm circumsusa repentè
Scindit se nubes, in œthera purgat apertum.
Restitit AEneas, clarâque in luce refulsit.
AEn.
lib. T.
(9) Le bonheur chez
les Anciens ne consistoit pas seulement dans la plus
douce existence de leur individu ; leur ame sembloit
trop active & trop élevée pour se borner au court
intervalle de leur vie. Le bonheur de leurs enfans
étoit une félicité dont ils jouissoient par
anticipation ; & ceux que le célibat, ou quelque
malheur, privoit de cette consolation, n'étoient
jamais mis au nombre des hommes heureux. Voilà le
fondement du vœu que forme Ulysse pour tous les
Convives qu'il implore.
(10) Madame Dacier me
paroît s'être trompée en cet endroit, & cette
Savante, guidée par Spondanus, a cru que
l'étonnement d'Alcinoüs venoit de ce que cette
apparition prétendue étoit hors du temps ordinaire,
tandis qu’il porte simplement sur le déguissement
qu'il suppose, & qui n'étoit point ordinaire aux
Dieux, quand ils venoient au milieu des Phaeaciens :
οὔ τι κατακρύπτουσιν
(vers 205) .
(11) Voilà la grande
opinion des Stoïciens : ils pensoient que l'homme
vertueux s'approchoit de la Divinité ; & ils
recommandoient la vertu, comme le seul moyen de nous
rendre semblables à l'Être suprême, dont nous sommes
émanés. Où Socrate avoit-il puisé cette idée
sublime. Dans l'antiquité, sans doute, où il ne
cessoit de puiser, ainsi qu'il le dit lui-même, en
l'appelant le trésor des Sages.
(12) Combien d'hommes
enviés pourroient faire la même réponse, & dire,
comme le Vulteius d'Horace !
Pol ! me miserum, patrone, vocares,
Si velles inquit, verum mihi dicere nomen.
Lib I, Ep. viii
(13) Cette partie du
récit des malheurs d'Ulysse n'est point inutile à la
rnarche du Poëme, Comment Alcinoüs voudroit-il
aspirer à retenir Ulysse dans son île, quand il
saura ce qu'il a refusé pour la seule espérance de
revoir, sa Femme & sa Patrie ?
Quelques réflexions que je fasse sur l'art infini
d'Homère dans la conduite de son Poëme, je suis
persuadé que le Lecteur, pour peu qu'il veuille y
apporter d'attention, profitera encore davantage de
celles que je lui laisse à faire.
(14) Quelle bienséance
admirable de mettre ces paroles dans la bouche du
Père, plutôt que dans celle de la Reine ! Si
quelqu'un de mes Lecteurs en cherchoit la raison, il
n'est point de femme & de mère qui ne puisse la lui
apprendre ; mais ces sortes de choses se devinent, &
ne s'apprennent jamais.
(15) Je ne sais si des
Casuistes sévères pourroient blâmer le mensonge
qu'emploie Ulysse pour excuser Nausicaa ; mais j'ose
croire que ce mensonge seul seroit fait pour montrer
que le siècle d'Homère connoissoit déjà tout ce que
la politesse a de plus délicat, & que les gens du
monde apprendront par ce trait & par mille autres
répandus dans les Poèmes d'Homère, à apprécier les
reproches de barbarie qu'on a faits si souvent & si
mal-à-propos à ces siècles héroïques.
(16) Les Commentateurs
trouvant la proposition d'Alcinoüs un peu
précipitée, n'ont pas manqué de subtilités pour la
justifier, à leur manière. Ils ont imaginé que le
Roi, par le desir qu'il témoignait à cet Étranger,
ne cherchoit qu'à l'éprouver. Ils ont ajouté que ces
sortes de mariages n'étoient point d'ailleurs sans
exemples dans l'antiquité ; mais s'ils avoient voulu
faire un peu plus d'attention au véritable esprit
d'Homère, ils auroient vu que, lorsque ce Poëte met
en jeu quelqu'un de ses Héros, dont il veut relever
la gloire, il lui sait opérer des prodiges
surnaturels, & qui cependant acquièrent une sorte de
vraisemblance poétique par la manière dont ils sont
amenés. C'est ainsi qu'on a vu dans l'Iliade Achille
paroissant sur les remparts du camp des Grecs,
frapper de terreur toute l'armée des Troyens, & les
précipiter les uns sur les autres. Ici c'est une
merveille d'une autre espèce. Homère, pour relever
les charmes extérieurs de son Héros, suppose que
Minerve a versé sur lui des grâces nouvelles, qu'en
conséquence la fière Nausicaa en paroît éprise
presque au premier abord, & qu'Alcinoüs délire de
l'avoir pour son gendre. Mais ce souhait d'Alcinoüs
est précédé d'un éloge, qui sait assez connoître
l'enchantement dont la vue d'Ulysse l'a frappé ; il
le prend pour un Dieu, ou suppose qu'il peut l'être
: après Un semblable témoignage d'admiration, est-il
étonnant qu'Alcinoüs desire de l'avoir pour gendre ?
Si je reviens un peu fréquemment sur ces artifices
de la poësie d'Homère, il saut s'en prendre aux
Commentateurs, qui me paroissent l'avoir souvent
interprété sans l'avoir entendu.
(17) Cette histoire
de Rhadamante a fait imaginer à Eustathe qu'Alcinoüs
ne racontoit ce merveilleux voyage que pour
persuader à Ulysse que l'île des Phaeaciens étoit
près des îles Fortunées, parce que Rhadamante
habitoit une de ces îles. Subtilité de Commentateur, qui ne sert de rien à l'intelligence du Poëte, non
plus qu'à la connoissance de la position de Schérie,
qu'Homère, comme nous l'avons dit, n'a pas voulu
déterminer, pour qu'on ne pût pas douter que
toutes les merveilles qu'il en raconte ne soient
sorties de son imagination.
(18) L'expression
grecque, telle qu'elle est communément entendue,
semble dire qu'Arête se fit dresser un lit auprès de
son Époux : Madame Dacier & Pope ont remarqué que
cela étoit sans exemple dans Homère, & absolument
contraire à l'usage pratiqué dans l'antiquité. Ils
auroient dû observer en même temps que cette même
expression est susceptible d'un autre sens plus
véritable, qui est celui que j'ai adopté dans ma
traduction.
λέχος πόρσυνε καὶ εὐνήν
(vers 347)
proprement garnit son lit. C'est dans ce sens
qu'Hélène, au III° Livre de l'Iliade, dit à Vénus
qu'elle ne veut plus partager le lit de Pâris :
κείνου πορσανέουσα
λέχος
(vers 411).
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