Chant IX
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Lorsqu'il eut activé et fini ces besognes, il ranima son feu, nous aperçut et nous interrogea :

   — Étrangers, qui êtes-vous ? D'où venez-vous sur les routes des eaux ? Est-ce en vue d'un négoce, ou bien errez-vous à l'aventure, comme font les pirates qui errent sur la mer, exposant leur vie et portant le désastre sur les côtes étrangères ? »

   Ainsi parla-t-il, et nos coeurs se brisèrent sous la peur de ce monstre et de sa voix terrible. Malgré tout, je pris la parole et répondis ces mots :

   — Nous sommes Achéens ; nous revenons de Troade, et toutes sortes de vents nous ont égarés sur le grand gouffre des mers...

 

Ainsi parlai-je. Mais le cœur du Cyclope redoubla de colère. Il arracha le faîte d'une haute montagne et le jeta sur nous.

 

Pour moi, comme il restait un bélier, le plus fort du troupeau tout entier, je le pris par le dos, et, me pelotonnant sous son ventre velu, je m'y tins immobile. Les deux mains enroulées dans la toison prodigieuse, je restai suspendu avec acharnement, sans que faiblît mon cœur. Ainsi, tout en gémissant, nous attendîmes la divine Aurore.